Français en prépa scientifique : réussir l’oral
L’oral de français en prépa scientifique
C’est une matière considérée comme mineure en raison du peu d’heures de cours de francais qui y sont consacrées par semaine. Pourtant, l’oral de français, épreuve dédaignée à tort, peut rapporter bien des points supplémentaires et faire gagner des places au concours CPGE scientifiques jusqu’à intégrer Polytechnique. D’autant que son coefficient équivaut presque toujours à celui d’une matière scientifique (6 pour Polytechnique, 5 pour les Mines, 6 en e3a, par exemple). Surtout, c’est un enseignement qui permet d’acquérir une culture générale de qualité et des capacités de réflexion particulièrement valorisées dans les entreprises.
Lire : Cours de français en prépa scientifiques
Alors, pourquoi ne pas se mettre sérieusement au français dès maintenant ?
Les exigences d’un oral de français en prépa sont différentes de celles d’un oral en mathématiques sur certains points, mais les deux épreuves demandent, semblablement, des capacités à s’adapter au sujet, à mobiliser ses connaissances avec souplesse ou encore à organiser un raisonnement construit et argumenté : plutôt rassurant, non ? Pour le reste, voici comment bien vous préparer à votre oral de français en amont, assurer sur la méthode le moment venu et briller par votre aisance à l’oral face au jury.
Remarque : la colle de français devant être pensée comme un oral blanc, cet article entend vous donner des clés aussi bien pour l’une que pour l’autre. Nous parlerons donc de « jury » indistinctement pour « colleur » ou « examinateur du concours ».
Se préparer en amont de l’oral de français ou pour une colle
Renseignez-vous sur les formats des épreuves de français
Prenez le temps de vous renseigner sur les exigences de chaque épreuve de français en prépa selon l’école que vous présentez. Les temps de préparation et de passage varient, de même que les types d’exercices. Notez-les et projetez-vous en faisant des simulations : « si je tire un sujet à telle heure, j’ai terminé tel exercice à telle heure, tel autre à telle heure, et ainsi je respecte le temps imparti. » Cela vous permettra, le jour J, de savoir si vous êtes en retard ou en avance par rapport à un temps de travail idéal, que ce soit lors de votre brouillon ou lors de votre oral ou colle de français.
Assurez-vous également que vous maîtrisez la méthode pour l’épreuve d’oral de français en prépa scientifique : si nécessaire, renseignez-vous, auprès de vos professeurs, mais aussi d’un manuel ou d’un rapport de jury, sur les méthodes de résumé (Mines et X-ENS), de commentaire de document iconographique (Mines-Télécom) et de « dissertation orale » (Mines et X-ENS). Lisez des rapports de jury récents (environ deux par école), afin de cibler les erreurs à ne vraiment pas commettre. Voici le déroulé des épreuves des Mines (CCMP), des Mines-Télécom, de Polytechnique (concours X-ENS) et des Arts et Métiers (e3A).
Oral de français concours Mines Ponts
A l’oral des Mines, on vous soumettra un texte d’idées sans rapport avec le programme, datant généralement des années 2000 (mais pouvant remonter jusqu’aux années 1950) et long d’environ 700 mots. Vous disposerez de 30 minutes de préparation. Votre présentation orale devra durer 20 minutes et comporter un résumé-analyse (5 à 7 minutes) et un commentaire, aussi appelé « développement personnel » ou « dissertation » (13 à 15 minutes). S’ensuivra un des questions d’entretien pendant 10 minutes.
Oral de français concours Mines-Telecom
Aux Mines-Télécom, l’oral de français se déroule sans préparation. A partir d’un document iconographique que vous commenterez brièvement, vous devez vous présenter selon le modèle d’un entretien de personnalité : centres d’intérêts, expériences, projets à plus ou moins long terme. L’entretien dure 25 minutes.
Oral de français concours Polytechnique
A l’oral de Polytechnique, vous disposerez de 45 minutes pour préparer l’analyse d’un texte littéraire ou philosophique du XVIe au XXIe siècle, sans rapport avec le programme. Votre présentation orale devra durer 15 minutes, découpées comme suit : moins d’une minute pour introduire, en une phrase courte mais dense, le texte étudié (titre, auteur, date, thèmes), 3 minutes maximum pour lire un résumé du texte que vous aurez rédigé, 11 minutes environ de dissertation orale à partir de la phrase-clé du texte. Vous aurez ensuite un entretien de 15 minutes.
Oral de français concours E3A
Pour les Arts et Métiers, l’épreuve intitulée « entretien » consiste en l’analyse d’un texte argumentatif en lien avec le programme, de n’importe quelle époque. Vous disposerez de 30 minutes pour le préparer et de 20 minutes pour présenter d’abord un exposé d’analyse du document de 10 minutes, puis un commentaire-dissertation mettant en relation le texte avec les autres au programme (environ 10 minutes). Cette présentation sera suivie d’un entretien avec le jury.
Enrichissez votre culture générale pour réussir une khôlle de français
Pour réussir une épreuve de français, il faudrait, croit-on parfois, avoir une culture générale infinie. S’il faut disposer effectivement de quelques jalons indispensables (apprenez en particulier les dates des grandes périodes historiques, littéraires et philosophiques), l’essentiel est ensuite de vous constituer un réservoir de quelques références personnelles solides. Considéré ainsi, se préparer correctement à un oral de français est tout à fait possible, même quand on dispose de peu de temps, à condition de procéder avec méthode.
Deux conseils :
- Privilégiez toujours la qualité à la quantité : préférez bien maîtriser huit références plutôt qu’en connaître vaguement une vingtaine ;
- Variez vos types d’exemples (littéraires, philosophiques mais aussi historiques et artistiques) : si vous êtes capable de développer avec précision (plus de trois phrases) au moins deux exemples dans chacun de ces domaines, c’est déjà un bon début !
Où trouver ces références, à présent ? D’abord, mettez à profit les cours sur le programme de l’écrit : pour chaque œuvre étudiée, faites des recherches complémentaires (biographie de l’auteur, courant philosophique ou littéraire) et sélectionnez un ou deux extraits précis que vous pourrez résumer et citer brièvement. A partir de vos cours sur les œuvres et de vos colles de français, constituez-vous également un réservoir de concepts et notions, qui vous permettront d’être concis(e) et percutant(e). Pour cela, relevez les notions utilisées par votre professeur et allez en vérifier le sens dans un dictionnaire de philosophie (comme La philosophie de A à Z, Hatier, 2011) ou littéraire (un lexique comme le Gradus, de B. Dupriez, 2003). A partir de ces notions, vous pouvez procéder par réseau : lisez et notez les définitions de deux ou trois notions majeures qui y sont rattachées. Tout en effectuant ce travail, continuez à vous projeter : « Telle notion me serait utile pour analyser un texte sur tel thème. » L’objectif est que, lors de votre oral, vous puissiez éviter les expressions qui indiquent que vous êtes incertain, comme les « en quelque sorte » et les « une sorte de », « une espèce de », « quelque chose de ».
Si vous pouvez aller plus loin, vous pouvez d’abord piocher dans des revues (Philosophie Magazine, Esprit, Le Magazine Littéraire) des articles sur des thèmes qui vous intéressent, regarder un film ayant fait date dans l’histoire du cinéma ou encore écouter quelques podcasts d’une émission culturelle comme « Les Chemins de la philosophie », « La Compagnie des auteurs », « La fabrique de l’histoire » sur France Culture ; « Ça peut pas faire de mal » (lectures et analyses de textes) ou « Le Masque et la Plume » (théâtre et cinéma) sur France Inter et retenez quelques idées pour rédiger une fiche de lecture.
Méthode de l’oral de français en prépa : attentes et erreurs à éviter
L’objectif ici n’est pas de vous proposer une méthode complète pour chaque exercice – cela existe déjà et serait trop long – mais de vous indiquer les attentes et les erreurs à éviter dans trois domaines : l’analyse d’une œuvre ou d’un texte, le commentaire personnel ou dissertation, et l’entretien.
- L’analyse d’une œuvre ou d’un texte (= document). Procédez toujours comme si vous expliquiez le document à quelqu’un qui ne l’avait pas sous les yeux. Ainsi, au brouillon, répondez de façon systématique et développée aux questions suivantes : quoi ? qui ? quand ? où ? quel type de document exactement ? quelle tonalité/quel registre/quels sentiments provoqués chez le lecteur ? quels objectifs/quelles intentions/pourquoi l’avoir publié ? Pour une analyse de texte, attachez-vous ensuite à décortiquer la structure argumentative du texte avec précision : adoptez une démarche non pas accumulative (« et aussi ») mais argumentative et logique, en distinguant les étapes du raisonnement. Enfin, cerise sur le gâteau, tâchez de dégager trois procédés rhétoriques.
Aidez-vous d’un dictionnaire durant l’année de prépa scientifique.
- Le commentaire personnel. La problématique de votre oral de français ou colle doit être autant que possible proche du texte (aidez-vous en choisissant systématiquement une citation comme point de départ ou accroche) : elle ne doit pas être trop générale (« Quel est le rôle de la langue dans la société ? », « Quelle est la fonction de la culture dans le monde ? ») mais précise sans être fermée (pour reprendre les exemples précédents, déterminez le type de rôle ou de fonction et interrogez-vous sur les problèmes que posent ce rôle ou cette fonction). Pensez ensuite à bien annoncer votre plan dès la fin de votre introduction et à rappeler le titre de chaque partie au cours de votre développement. L’ensemble de votre dissertation doit être constituée de deux choses au moins : 1° un travail de définitions, tout au long de la réflexion, de concepts et de notions, dont les sens peuvent varier selon les points de vue adoptés ; 2° un effort d’illustration, en développant (au moins 3 phrases) des exemples littéraires, philosophiques, historiques, artistiques.
- L’entretien. C’est le moment de tout donner ! Ne baissez pas les bras et ne relâchez pas votre attention parce que votre exposé est passé. Au contraire, soyez aux aguets, prêts à engager un dialogue, acceptez de corriger ce que vous avez dit, cela ne pourra que vous faire gagner des points.
Briller par son aisance à l’oral en français
Vous pouvez aisément vous entraîner à l’oral seul chez vous : entraînez-vous à lire à voix haute les textes que vous étudiez en classe, essayez régulièrement de réciter votre cours comme si vous le disiez à quelqu’un et reprenez chaque colle passée pour la refaire, en mieux. Pendant l’année, vous aurez l’occasion de passer trois colles de français (une par trimestre) : profitez de ces entraînements pour demander à votre colleur de français les points d’amélioration à travailler. Cela vous aidera à mieux parler à l’oral.
Un oral est régi par des codes, qui sont autant de signes que vous envoyez à votre jury pour lui faire comprendre que vous partagez le même univers de références que lui. Les conseils qui suivent entendent vous présenter quelques-uns de ces codes : ils sont inspirés d’un chapitre intégralement consacré à ce sujet dans le manuel Je réussis ma khâgne (G. Frecaut, A. Payen de la Garanderie, P. Pini, Armand Colin, [2016] 2018), dans lequel vous trouverez également plusieurs chapitres consacrés à la méthode de la dissertation.
- Donnez le sentiment que vous êtes content d’être là (et non que vous seriez mille fois mieux ailleurs, même si c’est le cas). Souriez dès votre entrée, saluez cordialement votre jury et veillez à mettre un certain en train à votre présentation (sans trop en faire non plus évidemment) : mettez le jury dans des dispositions favorables en étant vous-même dans une attitude ouverte et accueillante.
- Soignez votre posture et votre tenue pour l’oral. Asseyez-vous correctement, tenez-vous droit dans votre siège, les pieds bien ancrés au sol, les mains à plat sur la table ou croisées devant vous (pas cachées sous la table ni en train de torturer un malheureux crayon sur lequel vous vous déchargez de votre stress). En somme, faites-en sorte d’adopter une posture dynamique et (en apparence) sereine !
- Posez votre voix. Si besoin, soufflez une bonne fois avant de commencer, parlez lentement d’abord pour la poser, puis trouvez un rythme fluide et calme. Veillez à adapter le niveau sonore de votre voix à la taille de la salle dans laquelle vous vous trouvez. Faites aussi des pauses, tirez parti de quelques silences, qui vous permettront à la fois de laisser du temps à votre jury pour noter des éléments et de créer un effet d’attente. En particulier, faites une pause après votre problématique, après votre plan et après chaque annonce de titre.
- Travaillez votre regard. Cherchez aussi souvent que possible à croiser le regard de votre jury (il suffit, en général, de lever les yeux de votre feuille !) : cela est particulièrement valable pour les moments clés de votre travail, comme les annonces de plan, les titres de parties, les questions problématiques.
- Enfin, évitez autant que possible les expressions suivantes : « de par », « *des fois », « *en dernière » (soit « en dernier » – invariable – soit « la dernière »), les « euh », « bah », « donc » intempestifs et les « l’auteur va dire/commencer » (vous ne prophétisez pas sur les annonces à venir de l’auteur : dites simplement « l’auteur commence… »).
Les oraux de français sont aussi un moyen de vous évaluer sur votre maîtrise générale de la langue française. Pour cela, vous pouvez vous exercer sur des exercices sur le participe passé ou bien réviser les figures de style par exemple. En effet, ce sont autant de notions qu’il faut maîtriser pour réussir cette épreuve.
Avec de l’entraînement, l’ensemble de ces recommandations pourront bientôt devenir pour vous de véritables automatismes : investissez-vous un maximum dans les colles qui vous sont proposées au cours de l’année et n’hésitez pas à créer un petit groupe de travail avec deux ou trois camarades, afin de vous faire passer mutuellement des oraux. Bon courage !
Adèle Payen de la Garanderie
A propos d’Adèle :
Normalienne (Lettres, A/L), agrégée de Lettres modernes, et bientôt doctorante, j’ai déjà eu l’occasion d’enseigner deux ans le latin au lycée et suis colleuse depuis 2016 à Louis-le-Grand en hypokhâgne et à Michelet en PC*. Mes réflexions sur la pédagogie m’ont amenée à publier le manuel « Je réussis ma khâgne ».
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