Dissertation corrigée sur la description du travail en CPGE scientifique
Livre II de la Mare au diable - George Sand (1846)
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Sujet de dissertation de français en prépa : description du travail
Nous avons rédigé un article comprenant une dissertation sur le thème du travail, qui pourrait être utile pour les étudiants préparant les concours scientifiques des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE), tels que MP, PSI ou BCPST. Cette dissertation corrigée peut être un outil précieux pour vous aider à comprendre la méthode et les connaissances nécessaires pour réussir les concours d’entrée aux grandes écoles, tels que Centrale, Mines Ponts ou Polytechnique.
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Voici le sujet que nous allons traiter dans cette dissertation sur le thème du travail en CPGE
« Le vieux laboureur travaillait lentement, en silence, sans efforts inutiles. Son docile attelage ne se pressait pas plus que lui ; mais grâce à la continuité d’un labeur sans distraction et d’une dépense de forces éprouvées et soutenues, son sillon était aussi vite creusé que celui de son fils, qui menait, à quelque distance, quatre bœufs moins robustes, dans une veine de terres plus fortes et plus pierreuses. »
Que vous inspire cette description du travail par George Sand, au Livre II de la Mare au diable (1846) ?
Accroche de la dissertation : A la sueur de ton front tu mangeras du pain jusqu’à ce que tu retournes à la terre puisque tu en es tiré, car poussière tu es et à la poussière tu retourneras ». Bien loin de la vision méliorative, idyllique voire idéalisée du travail paysan que semble proposer George Sand à première vue (mais nous complexifierions cet état des lieux par la suite), l’Ancien Testament présente plutôt le travail paysan comme un labor pénible, harassant, résultant d’une malédiction comme d’une punition après qu’Eve a goûté au fruit défendu… Comment alors jauger un tel différentiel manichéen dans les représentations du travail paysan ?
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Définition des termes du sujet de dissertation – travail et repos
Chez George Sand, en effet, la tonalité de la description paysanne se fait à la fois descriptive et méliorative. Descriptive tout d’abord : car nous retrouvons dans la citation l’usage répété de l’imparfait à valeur descriptive (« travaillait ; ne se pressait pas ; était ; menait »). Cette description n’est cependant pas neutre, mais méliorative, portant une vision positive du travail paysan. On trouve ainsi un champ lexical de l’effort productif : « sans efforts inutiles ; grâce à » ; ou une série de comparatifs à valeur laudative (« aussi vite… »). Le champ lexical de l’effort (« travaillait ; labeur sans distraction ; dépense ; éprouvées »), adjoint à celui de la force tranquille et patiente (« ne se pressait pas »…) nous met aussi sur une piste : si Sand semble faire l’éloge du travail paysan, c’est aussi pour en reconnaître toute la difficulté, l’ardeur et le sens du travail accompli.
Ce labeur paysan a d’autant plus de mérite qu’il réussit à dompter des forces opposées, et pourtant très proches du travail paysan : la nature. Le champ lexical de la nature, lui aussi omniprésent (« attelage ; sillon ; bœufs ; veines ; terres ; pierreuses… ») nous signale la présence d’un vivant qui joue un rôle double : à la fois adjuvant et opposant ; il faut en somme le dompter pour parvenir au travail efficace et accompli, le comprendre aussi. La présence de la famille dans l’environnement immédiat (avec la mention du fils), comme du triomphe de la sagesse de l’expérience (le père en sait plus que le fils, comme en témoigne la comparaison « aussi vite creusé ») sont également des valeurs véhiculées par cette citation. Ainsi nous sommes face à une description d’un travail paysan qui triompherait des forces de la nature, ou s’appuierait sur elles, et arriverait, à force d’épreuves et d’abnégation, à un résultat peut-être modeste, mais digne de louanges.
Ici, Sand décrit donc bien le travail du paysan en premier lieu, comme labor (activité manuelle, physique, harassante, ne demandant pas un surcroît de recours à des forces intellectuelles) – non le negotium de l’homme d’affaires, non l’otium du philosophe. Il ne sera pas, cependant, inutile de nous demander dans quelle mesure cette description du travail paysan pourrait s’élargir à la diversité du spectre du travail.
Il ne sera pas non plus interdit de nous demander si cette vision du travail n’est pas quelque peut-être idéalisée, naïve. En effet, Sand semble ici parvenir à une sorte de réhabilitation du travail paysan, pourtant perçu, notamment sous l’Antiquité, comme presque dégradant (comme par Platon qui ne réservait pas les tâches de direction aux paysans) ou encore durant le Moyen age (le droit de dérogeance signale bien cette hiérarchisation du travail, en interdisant aux nobles le fait de « tenir ferme »). Mais ici, le paysan nous apparaît comme un socle de sagesse (« vieux »), de stabilité, d’efficacité, de savoir tacite mais sûr (« en silence »), d’économie des moyens. La valorisation du « bon sens paysan » n’est pas très loin.
Pour autant, en seconde lecture, c’est une vision possiblement négative qui pourrait aussi se dégager. En effet, l’exécution des tâches par le paysan paraît presque mécanique, sans faire une grande place à l’activité intellectuelle, à la grandeur de l’âme humaine, ni au plaisir (« labeur sans distraction ») ; la vie d’un paysan doit-elle se réduire idéalement à ce travail efficace, mais peu valorisant ? Le champ lexical de la lenteur (« lentement, ne se pressait pas ») se fait-il enfin l’écho de la persévérance ou de la moindre productivité ? Si les valeurs d’abnégation ou de proximité avec la nature ou la famille peuvent être promues, ne sont-elles pas de plus en plus anachroniques en 1846 ?
Il serait ainsi possible de voir dans cette citation le reflet d’une nostalgie, celle des valeurs paysannes en voie de disparition : car nous sommes bien en 1846, période de révolution industrielle, et surtout d’exode rural. Cette description est-elle ainsi moins le signe d’un éloge profond du travail paysan presque médiéval, que le reflet d’une nostalgie infondée ?
Idéalisation et description du travail paysan par George Sand
George Sand ne conduit-elle pas à idéaliser le travail paysan dans sa description ? N’est-elle pas nostalgique, en pleine période d’exode rural ?
Problématisation par rapport aux œuvres de CPGE
Nous sommes donc face à un paradoxe : d’un côté, le travail paysan véhicule des valeurs positives, qui sont celles de l’abnégation, de l’ardeur au travail, de la proximité avec la nature ou la famille ; d’un autre côté, n’est-il pas plus désirable pour la grandeur de l’âme humaine d’aspirer à un travail plus épanouissant, libérateur intellectuellement, productif ? Le diable se cache-t-il dans les détails comme dans la mare ?
Annonce des axes de la dissertation en prépa
- En première instance, la description de Sand peut être vue sous un prisme mélioratif : la proximité du paysan avec la nature et la famille, son sens de l’effort, cette éthique paysanne de la sereine et efficace tranquillité, peuvent être érigés en modèle à suivre pour une société.
- Cependant, nous mettrons en lumière l’aspect idéalisé ou irréaliste de la vision de Sand, en montrant au contraire que le travail notamment paysan est plus précaire, y compris intellectuellement.
- En dernière instance, il nous apparaîtra nécessaire de réhabiliter la part de l’intellect comme de la joie au travail, éléments absents de la description de Sand.
Le « diable » du travail paysan se cache-t-il dans les détails ?
La description du travail paysan par George Sand peut, en première instance, apparaître sous un jour positif : en effet, la double proximité du paysan avec la nature comme avec sa famille assoit ce « labor » sous un socle de valeurs morales à portée possiblement positive : l’abnégation, le sacrifice de soi, la persévérance, l’opiniâtreté. Cet ethos paysan peut ainsi être érigée en repère pour une société.
En premier lieu se dégage ainsi une vision méliorative du travail paysan : une double proximité, avec la nature comme avec la famille, signale son intervention harmonieuse dans son environnement – dans l’ordre « cosmique » pour reprendre un lexique stoïcien.
Exemple : Simone Weil est elle-même bien conscience de la nature spécifique du travail paysan, à travers sa proximité avec la nature. Comme elle le remarque dans « Expérience de la vie d’usine », il existe une opposition forte, de « nature » justement, entre le travail du paysan et de l’ouvrier – lui dont le travail est dominé par la succession du temps, des saisons. « La succession absolument uniforme en même temps que variée et continuellement surprenante des jours, des mois, des saisons et des années convient exactement à notre peine et à notre grandeur. (…) Le travail du paysan obéit par nécessité à ce rythme du monde » remarque-t-elle ainsi.
Exemple 2 : la proximité du travail paysan d’avec l’environnement familial, mise en avant par George Sand, est également au centre de la vie quotidienne du paysan des Géorgiques. L’amour des siens, correspondant aux valeurs romaines de la pietas (la dévotion aux dieux mais aussi l’amour des proches), est par exemple décrite dans des termes émouvants au Livre II : « Cependant ses enfants câlins suspendus à son cou se disputent ses baisers ; sa chaste demeure observe la pudicité. »
Transition : Cette double proximité du travail paysan avec la nature et la famille, décrite par George Sand et illustrée dans nos trois œuvres au programme, a une utilité bien circonscrite : elle permet au paysan de « tenir », d’être efficace, de faire son devoir ; de réaliser en somme l’autre aspect positif de cette description, l’abnégation, le goût de l’effort et du travail bien fait, une vertu aussi sociale et politique.
Le travail paysan ne permet-il pas d’exalter des vertus saines, celles de l’ardeur au travail, du goût du travail bien fait, de la proximité avec la famille et la nature ?
La vision de Sand renvoie dès lors une image méliorative du travail paysan, mettant en valeur les vertus classiques du « bon sens » du travail paysan : la fierté de l’effort accompli, la persévérance dans l’attachement à la terre et au devoir, l’application, la persévérance.
Exemple : Cet exemple de travail « opiniâtre » peut être érigé en valeur d’exemple à suivre pour toute une société (y compris au-delà du travail paysan) : on songe ici à la visée proprement politico-sociale de l’ouvrage des Géorgiques – Virgile en effet vise à faire de l’éthique paysanne un modèle à promouvoir dans le cadre de la revalorisation (entreprise par Auguste) de la morale romaine traditionnelle. Dans cette mesure, l’opiniâtreté du paysan à accomplir sa tâche devient un modèle de stabilité, de sacrifice, d’abnégation, après le tourbillon des guerres civiles. C’est pourquoi l’on trouve une forte présence dans les Géorgiques du champ lexical de l’effort, de la dévotion et de l’ardeur au travail, comme ici au Livre II : « Le laboureur fend la terre de son areau incurvé : c’est de là que découle le labeur de l’année ; c’est par là qu’il sustente sa patrie et ses petits-enfants, ses troupeaux de bœufs et ses jeunes taureaux qui l’ont bien mérité. Pour lui, point de relâche, qu’il n’ait vu l’année regorger de fruits, ou accroître son bétail, ou multiplier le chaume ». Ce travail est ainsi productif et utile, comme en témoigne le champ lexical de l’abondance (« regorger de fruits, ou accroître son bétail, ou multiplier le chaume »). Le paysan de Sand ressemble à bien des égards à celui de Virgile.
Transition : Cependant nous pouvons faire deux objections à cette présentation positive d’un tel labor paysan. D’une part, le travail paysan n’est pas tout le travail : peut-on appliquer les mêmes recettes (opiniâtreté, abnégation, etc…) à l’ensemble du spectre du travail ? D’autre part, et surtout, cette vision méliorative du travail paysanne n’est-elle pas quelque peu idéalisée ?
Le travail paysan décrit dans les Géorgiques de Virgile
Le travail paysan tel que décrit dans les Géorgiques de Virgile est-il totalement désirable ?
La vision du travail paysan proposée par George Sand peut cependant paraître, sous un nouvel examen, assez idéalisée ou irréaliste, sous-estimant la précarité du travail paysan – y compris sa précarité intellectuelle.
George Sand nous présente ici une vision assez idéalisée ou peu réaliste de l’entièreté du travail paysan – voire du travail en général. Celui-ci en effet est bien plus féroce – Sand semblant en sous-estimant les aspects les plus difficiles ou insurmontables. Le travail peut ainsi brutaliser psychologiquement ou physiquement.
Exemple : La pression psychologique induite par le travail, l’exigence du rendement, les luttes d’ego et d’orgueil aussi au sein des environnements de travail, ne sont tout d’abord pas à sous-estimer. Précisément chez Michel Vinaver, c’est ce cadre familial (que semble tant vanter Sand) qui est détruit par l’univers sans pitié du negotium du papier toilette. Une famille se déchire, allant jusqu’au parricide. Comme l’indique l’auteur dans son introduction, « le bâtard serait résolu à se débarrasser de son père et de son frère, par tous les moyens, pour rester seul à bord ». Plus prosaïquement, le fait de se consacrer autant au travail peut conduire aussi à négliger la vie familiale. Ainsi dans un échange Lubin/Joelle, les deux personnages se confient : « — C’est vrai que je passe plus de temps avec vous qu’avec ma femme moi aussi — Bien sûr c’est pareil ».
Exemple 2 : Nous voyons ainsi que ce qu’affirme Sand n’est peut-être pas applicable à l’entièreté du travail. Mais quid du travail paysan lui-même ? Sa situation, même dans les Géorgiques, demeure peu enviable. Le labeur paysan semble parfois bien inutile, quand une zoonose peut par exemple détruire les récoltes paysannes (Virgile décrit ainsi les « quintes de toux [qui] secouent les porcs », « les yeux […] enflammés », le « long hoquet », le « sang noir [qui] coule des naseaux » des chevaux, le taureau qui « vomit à plein gosier un sang mêlé d’écume »). Le travail du paysan est également répétitif, sans fin, tournant en rond : le travail de la vigne n’est ainsi « jamais épuisé » et le travail « revient toujours en un cercle » écrit Virgile au livre II.
Transition : Les tâches confiées au paysan sont d’ailleurs, par leur nature répétitive, particulièrement mécaniques ; et ne font ainsi pas honneur à la dignité, à la grandeur de l’intellect humain. De même dans la citation de Sand, on semble retrouver une même valorisation d’un travail mécanique, presque animalisant, avec un homme ne parlant pas, taiseux, discret, comme s’il était un robot plus qu’un individu.
Le travail paysan, physiquement ou psychologiquement éprouvant, n’est également pas un travail, dans la description de Sand du moins, rendant hommage à la grandeur de l’intellect humain.
Exemple : Le labor paysan se rapproche ainsi du labor de l’ouvrier, tel que décrit par Simone Weil. Comme elle le relève (dans les lettres à Albertine Thévenon), le travail à l’usine nie la possibilité de pensée : « C’est seulement le samedi après-midi et le dimanche que je respire, me retrouve moi-même, réacquiers la faculté de rouler dans mon esprit des morceaux d’idées. D’une manière générale, la tentation la plus difficile à repousser, dans une pareille vie, c’est celle de renoncer tout à fait à penser : on sent si bien que c’est l’unique moyen de ne plus sombrer J’ai le plus grand respect pour les ouvriers qui arrivent à se donner une culture » écrit-elle ainsi. « Je ne puis obtenir de moi ce vide mental, cette absence de pensée indispensable aux esclaves de la machine moderne » écrit-elle aussi par ailleurs.
Transition : Dès lors, la description du travail paysan faite par Sand nous apparaît comme assez idéalisée, et peu représentative de la réalité. Sans doute trahit-elle peut-être une certaine nostalgie d’un ordre sociétal avant l’exode rural de la Révolution industrielle… Mais à la suite de Sand, nous pourrons enfin nous demander comment rendre ce travail plus désirable – tout en conservant ses aspects les plus positifs comme le lien à la nature ou à la famille.
Le travail paysan est difficile et stressant
La suite de ce cours de français, dissertation corrigée (partie 3 et conclusion) sur la description du travail par George Sand en prépa scientifique, se trouve dans notre application mobile PrepApp. Notre appli mobile est gratuite en téléchargement sur Google Play ou Apple store.
Voici le plan de la partie 3 et de la conclusion que vous retrouverez dans l’application PrepApp entièrement corrigées :
Le travail paysan ne va pas sans aléas, sans pression psychologique et matérielle
La nature est généreuse, mais elle peut être également impardonnable ou cruelle
Conclusion du thème : la description du travail
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