Analyse de documents d’histoire au concours Sciences Po
Exemples et corrigés d'analyse de documents d'histoire au concours Sciences Po
Tout savoir sur l’analyse de documents en histoire au concours Sciences Po
L’épreuve d’histoire au concours Sciences Po consiste en une épreuve d’analyse de documents historiques. Les épreuves du concours Sciences Po sont communes aux 7 IEP et l’épreuve d’histoire est aussi commune à tous les candidats et dure 2 heures.
Le sujet de chaque épreuve d’histoire au concours Sciences Po comporte la consigne suivante : « À partir d’une analyse critique de ces documents et de vos connaissances, vous analyserez comment … sujet ».
Une liste de documents vous sera distribuée à partir de laquelle vous en sortirez une analyse et une réflexion profonde pour donner réponse à la consigne. Vous devrez alors rédiger un devoir structuré. Il ne s’agit pas de faire une dissertation, mais de bien analyser les sujets principaux qui sortent des documents et de vos propres connaissances sur l’histoire.
Pour vous préparer au concours Sciences Po, et plus particulièrement à l’épreuve d’histoire du concours, nous vous invitons à vous inscrire à un stage de préparation concours Sciences Po. Vous pourrez travailler sur les annales de l’épreuve d’histoire Sciences Po pour vous entraîner et réviser pour le concours. Vous serez assistés par des professeurs d’histoire qualifiés et agrégés qui vous apporteront tous les conseils nécessaires pour réussir l’épreuve d’histoire du concours Sciences Po.
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Exemples et corrigés d’analyse de documents d’histoire Sciences Po
Nous allons prendre ici quelques exemples pour vous illustrer comment vous y prendre à l’épreuve d’histoire au concours Sciences Po.
Exemple 1 d’analyse de documents d’histoire Sciences Po
Consigne : En analysant les documents, vous expliquerez quelles réponses économiques et sociales le Front populaire apporte à la crise de 1929 en France. L’analyse des documents constitue le cœur de votre travail et nécessite pour être menée la mobilisation de vos connaissances.
Document 1 : Les accords de Matignon, 7 juin 1936.
«Les délégués de la Confédération générale de la production française et de la CGT se sont réunis sous la présidence de Monsieur le Président du Conseil, et ont conclu l’accord ci-après, après arbitrage de Monsieur le Président du Conseil :
Art.1. La délégation patronale admet l’établissement immédiat de contrats collectifs de travail.
Art.2. Ces contrats devront comprendre notamment les articles 3 à 5 ci-après.
Art.3. L’observation des lois s’imposant à tous les citoyens, les employeurs reconnaissent la liberté d’opinion, ainsi que le droit pour les travailleurs d’adhérer librement et d’appartenir à un syndicat professionnel constitué en vertu du livre III du Code du travail. Les employeurs s’engagent à ne pas prendre en considération le fait d’appartenir ou de ne pas appartenir à un syndicat pour arrêter leurs décisions en ce qui concerne l’embauchage, la conduite ou la répartition du travail, les mesures de discipline ou de congédiement […]
Art.4. Les salaires réels pratiqués pour tous les ouvriers à la date du 25 mai 1936 seront, du jour de la reprise du travail, rajustés suivant une échelle décroissante commençant à 15% pour les salaires les moins élevés pour arriver à 7% pour les salaires les plus élevés, le total des salaires de chaque établissement ne devant, en aucun cas, être augmentés de plus de 12% […]
Art.5. En dehors des cas particuliers déjà règles par la loi, dans chaque établissement comprenant plus de dix ouvriers, après accord entre organisations syndicales, ou, à défaut, entre les intéressés, il sera institué deux ou plusieurs délégués ouvriers selon l’importance de l’établissement. Ces délégués ont qualité pour présenter à la direction les réclamations individuelles qui n’auraient pas été directement satisfaites, visant l’application des lois, décrets, règlements du Code du travail, des tarifs de salaires, et des mesures d’hygiène et de sécurité […]
Art.6. La délégation patronale s’engage à ce qu’il ne soit pris aucune sanction pour faits de grève.
Art.7. La délégation confédérale ouvrière demande aux travailleurs en grève de décider la reprise du travail dès que les directions des établissements auront accepté l’accord général intervenu et dès que les pourparlers relatifs à son application auront été engagés entre les directions et le personnel des établissements ».
Cité par Jean Vigreux, Histoire du Front populaire, l’échappée belle, Tallandier 2016.
Document 2 : Dessin de presse de Robert Fuzier.
Source : Le Populaire, journal du parti socialiste, 2 août 1936.
Corrigé de l’exemple 1 d’analyse de documents d’histoire Sciences Po
À partir de 1931, la France doit faire face à une crise économique liée à la crise économique née aux États-Unis. La crise est caractérisée par une hausse rapide du chômage et elle va engendrer une crise morale et politique. En 1936, le Front populaire remporte les élections et va apporter une réponse politique forte à ce climat tendu.
Le premier document ici présenté est constitué d’extraits des accords de Matignon, forme légale des lois sociales de 1936, prises par le front populaire. Les articles 3 et 5 donnent la liberté syndicale aux ouvriers et leur permettent de défendre leurs droits dans l’entreprise par l’élection de représentants du personnel. L’article 4 accorde une hausse générale des salaires. Le second document est un dessin de presse de Robert Fuzier, paru le 2 août 1936 dans le journal du parti socialiste, Le Populaire. Ce dessin présente les congés payés : les classes populaires accèdent aux vacances et aux loisirs, si bien que l’usine ferme « pour cause de vacances ».
En analysant les réponses économiques et sociales que le Front populaire apporte à la crise, on peut se demander si l’héritage de cette union de la gauche va au-delà des avancées sociales ponctuelles mises en place à l’époque.
La crise économique se double d’une crise morale et politique marquée par une montée des ligues d’extrême – droite raciste et xénophobe. Le 6 février 1934, une manifestation des ligues à Paris se transforme en une émeute sanglante faisant craindre la mise en place d’un régime totalitaire. Face à cette situation, La SFIO, les radicaux et le Parti communiste s’unissent en juillet 1935 et ils forment le Front populaire. Ils se donnent pour objectif de barrer la route à l’extrême – droite, de gagner les élections législatives de 1936 et de faire sortir le pays de la crise. Les élections législatives d’avril – mai 1936 donnent la majorité absolue au Front populaire à la Chambre des députés. Léon Blum est nommé Président du conseil et il forme un gouvernement constitué de socialistes et de radicaux soutenus par les communistes.
Les grèves de juin 1936 aboutissent à la signature des accords de Matignon et aux lois sociales de 1936.
Ces accords reconnaissent la liberté syndicale et imposent l’élection de délégués représentants les salariés. Ils accordent une augmentation générale des salaires pour relancer la consommation. Les délégués syndicaux devront négocier les conditions de travail et de salaires des ouvriers avec la direction de l’entreprise. Ces accords sont complétés par les lois sociales imposant la semaine de 40 heures et deux semaines de congés payés.
Ces lois doivent permettre d’améliorer la vie quotidienne des Français et de modifier durablement les conditions de travail. Elles ont également pour objectif de relancer les activités économiques par la hausse de la consommation et la création d’emplois. Léon Blum espère faire sortir le pays de la crise en améliorant durablement les conditions de vie des classes populaires, et en travaillant sur le bonheur des individus, à une époque où les loisirs prennent progressivement de l’importance. De façon très ironique, le dessin de presse ici présenté stipule : « la Front Populaire de France poursuit ses ravages. Il vient, entre autres méfaits, de provoquer la fermeture de certaines usines… en donnant aux ouvriers la possibilité de partir vers la mer ou la montagne à des tarifs inconnus jusqu’à ce jour ». Le dessin fait effectivement référence aux réductions sur les billets de train, jamais vues, donc, et décidées par le pouvoir, pour permettre aux ouvriers de partir, de connaître d’autres horizons. Ces « atrocités » sont à mettre en écho avec les vraies atrocités commises dans d’autres pays d’Europe, à la même époque, à l’aube des régimes totalitaires, comme en Allemagne ou en Italie, où le nazisme et le fascisme prenaient place.
Si la politique économique de Léon Blum a été un échec électoral, in fine, il n’en demeure pas moins que le Front populaire a freiné la montée de l’extrême droite et a évité la mise en place d’un régime totalitaire en France, à l’aube de la Seconde Guerre mondiale, notamment, selon les sociologues, en raison des politiques sociales ainsi mises en place.
Exemple 2 d’analyse de documents d’histoire au concours Sciences Po
Consigne : A partir des documents et de vos connaissances, vous montrerez comment et pourquoi les juifs d’Europe ont été persécutés durant la Seconde Guerre mondiale.
Document 1 :
Document 2 :
Corrigé de l’exemple 2 d’analyse de documents Sciences Po
La Seconde Guerre mondiale fut une guerre totale, extrêmement meurtrière et violente. Elle est le fruit de la volonté politique du régime nazi d’exterminer les juifs d’Europe et d’instaurer un empire fondé sur la pureté de la race.
Le premier document ici présenté est l’extrait d’un témoignage de Rudolph Hoess au procès de Nuremberg (1945-1946). Hoess était un commandant SS du camp d’Auschwitz de mai 1941 à décembre 1943. Le second document est une photographie représentant une grande affiche de promotion d’une exposition, vraisemblablement en France. L’exposition est intitulée : « Le juif et la France », et est organisée « sous l’égide de l’institut d’étude des questions juives ». L’image utilisée pour cette affiche représente un vieil homme juif caricaturé, tenant dans ses mains avec un regard avide un globe terrestre.
La confrontation de ces deux documents permet de prendre conscience de l’atmosphère de l’époque en termes de relations à la communauté juive et de saisir le climat de haine alors perceptible. Surtout, elle permettra de voir pourquoi et comment les juifs d’Europe ont été persécutés pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans quelle mesure cette persécution est-elle le fruit d’une idéologie totalitaire et destructrice ?
La haine des juifs d’Europe est au cœur du logiciel intellectuel de l’Allemagne nazie. Celle-ci poursuit plusieurs objectifs en lien direct avec son idéologie totalitaire. Le premier est celui d’un « espace vital », le « Lebensraum », qui consiste à considérer qu’il est nécessaire de disposer d’un espace libre pour une race pure, les Aryens, et d’écarter ainsi toute personne qui ne correspond pas à cette race. L’empire joue ainsi un rôle fondamental : il est la traduction politique de ce projet. L’idéologie totalitaire en Allemagne est donc avant tout fondée sur le racisme biologique, dont Mein Kampf trace les contours. La ségrégation va frapper les « ennemis du peuple » et les juifs en particulier. Les lois de Nuremberg en sont la marque légale. Elles ouvrent une période de violence : les 9 et 10 novembre 1938, durant la nuit de cristal, des magasins juifs sont incendiés.
Mais au-delà de ce projet politique très clair, la haine des juifs s’appuie sur de très vieux fantasmes largement partagés en Europe, consistant en une méfiance généralisée à l’égard des juifs. Le document photographique illustre parfaitement ce point : le juif est présenté comme dangereux, sale, inquiétant, voulant s’approprier la planète entière. D’une manière générale, depuis la période romaine, les juifs étaient mis à l’écart de la société car porteurs de toutes sortes de clichés relatifs à leur supposé projet caché d’hégémonie sur la terre. Le plan très clair de la persécution des juifs d’Europe – fondé sur les camps de concentration et d’extermination – par l’Allemagne nazie est une forme de réponse en actes à ces vieilles rengaines antisémites.
Ces actes sont eux le fruit d’une méthode horriblement bien huilée, comme le décrit le témoignage du commandant SS ici présenté. Les camps de concentration et d’extermination fonctionnaient par un tri préalable des individus. Ceux qui étaient en mesure de travailler – de façon forcée – étaient maintenus en vie. Les autres, et les enfants en bas âge également, étaient exterminés. L’extermination a commencé à se faire par l’usage des chambres à gaz en 1941 à Auschwitz, selon ce témoignage. Les prisonniers étaient enfermés dans la chambre et asphyxiés en quelques minutes. La cruauté absolue voulait que les cadavres étaient ensuite pillés, pour récupérer des objets de valeur sur eux, y compris des dents en or, par exemple.
De fait, une grande partie de la stratégie dans la persécution des juifs d’Europe réside dans un processus d’humiliation et de déshumanisation, dans les camps, mais également hors des camps. Les Tziganes ont aussi été exterminés, très massivement, dans la mesure où ils étaient considérés comme inutiles à la société et, comme le note le témoignage ici présenté, beaucoup trop nombreux. Cette humiliation, cette négation du caractère humain de certaines populations, fut en effet au cœur de la machine nazie et du processus de persécution des juifs d’Europe et d’autres groupes minoritaires et/ou ethniques.
La persécution des juifs en Europe est le fruit d’une idéologie mortifère. Idéologie qui a été accompagnée d’une méthode d’extermination, théorisée par les dirigeants du Reich, au premier titre desquels Hitler. Cette méthode est détaillée dans certains documents historiques et a permis au droit d’évoluer pour préciser les contours de notions comme le crime de guerre ou le crime contre l’humanité.
Références bibliographiques sur l’histoire au concours Sciences Po
Voici la liste des œuvres qui pourraient vous être utiles dans la préparation à l’analyse de documents d’histoire au concours Sciences Po :
- BERGER Françoise, FERRAGU Gilles, Le XXe siècle 1914-2001, Vanves, Hachette, 2016 (3e éd.)
- HOBSBAWM Éric, L’âge des extrêmes, Bruxelles, Paris, André Versailles, Le Monde diplomatique, 2008
- NOUSCHI Marc, Le XXe siècle, Temps, Tournants, Tendance, Paris, Collection U Histoire, Armand Colin, 2011
- RÉMOND René, Le XXe siècle de 1914 à nos jours. Introduction à l’histoire de notre temps, tome 3, Paris, le Seuil, 2014
- VAÏSSE Maurice, Histoire des relations internationales depuis 1945, Paris, A. Colin, 2017 (15e éd.)
- BERNSTEIN Serge, WINOCK Michel, Histoire de la France politique, tome 4, La France recommencée de 1914 à nos jours, Points histoire, 2017
- DELACROIX Christian, ZANCARINI Michelle, La France du temps présent, Paris, Belin, 2010
- SIRINELLI Jean François, La France de 1914 à nos jours, Paris, PUF, 2017 ( 3e éd.)
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