Durant le stage de maths spé à Pâques, nos élèves de cours de francais en maths spé, juste avant les concours CPGE se sont réunis pour travailler ensemble en petit groupe sous forme de travaux dirigés. Coronavirus oblige, le stage était en ligne mais les élèves ont su tirer parti au mieux des cours en ligne. Voici ci-dessous un transcript du travail réalisé. Merci aux élèves pour leur sérieux ainsi qu’à Mark notre professeur qui leur a donné cours et pour tous ses efforts !
Étude d’une dissertation sur la démocratie : citation de Noam Chomsky
Le linguiste américain Noam Chomsky a déclaré lors d’une interview radiophonique que : « L’endoctrinement n’est nullement incompatible avec la démocratie. Il est plutôt, comme certains l’ont remarqué, son essence même. C’est que, dans un État militaire, ce que les gens pensent importe peu. Une matraque est là pour les contrôler. Si l’État perd son bâton et si la force n’opère plus et si le peuple lève la voix, alors apparaît ce problème. Les gens deviennent si arrogants qu’ils refusent l’autorité civile. Il faut alors contrôler leurs pensées. Pour ce faire, on a recours à la propagande, à la fabrication du consensus d’illusions nécessaires. »
Vous discuterez la pertinence de ce propos à la lumière de votre lecture des œuvres au programme du thème 2020 en prépa : la démocratie.
Propositions de gloses
- Marius
Le peuple peut suivre les idées d’autrui sans perdre son pouvoir démocratique. Il conviendrait de rappeler que “endoctrinement” est un mot très fort et d’un usage quasi-exclusivement réservé aux régimes dictatoriaux -> la seule idée de “suit les idées d’autrui” est insuffisamment expressive donc.
Lorsque qu’il n’est plus contraint d’obéir par la force, le peuple devient indiscipliné. C’est juste ; à rappeler : cela se produit en D car l’Etat n’y possède pas la force militaire.
Pour éviter cela, il faut justifier, continûment, au citoyen, un comportement à adopter qui l’empêche de songer à la rébellion. Le terme ”justifier” est impropre. En changeant ce mot par “suggérer” voire “proposer discrètement mais sûrement” (quoique le tour soit familier), cette dernière phrase gloserait très bien l’esprit de la citation de Chomsky.
- Cyril
Imposer des pensées et des opinions à son peuple est un incontournable de la démocratie. Les régimes utilisant la violence physique ne se soucient pas des pensées du peuple. Ce n’est qu’une fois qu’ils en perdent l’usage et que le peuple se révolte contre l’autorité que l’on comprend que les pensées doivent être contrôlées et leurs opinions modelées par l’État. Cette glose est perspicace et va droit au but. C’est efficace mais il manque deux nuances importantes que le développement apporterait peut-être : l’originalité irrévérencieuse de Chomsky + préciser que c’est le fait de passer en démocratie qui ôte à l’État sa force naturelle.
- Florian
Dans un État militaire, le contrôle du peuple se fait par la force. En démocratie, lorsque le peuple est hors du contrôle du gouvernement, l’État, pour se maintenir, oriente les pensées des citoyens. Pour cela, la démocratie a recours à la propagande, cette dernière est alors intrasec -> intrinsèque à -> de la démocratie. (Une qualité intrinsèque de la démocratie est une qualité interne à la démocratie, une qualité qui la définit, la caractérise)
Les remarques de la glose de Cyril s’appliquent à celle-ci également : formulation efficace et porteuse mais il manque l’irrévérence de l’auteur.
Proposition de pbq + plan de Florian
Pbq : Par démocratie, on entend le pouvoir du peuple. De plus, le citoyen est leurré dans une irréalité par l’Etat. Peut-on alors encore parler de démocratie comme le pouvoir au peuple ? La dernière phrase de cette pbq est tout à fait bienvenue. Il est ici très probant d’aller s’interroger sur la définition étymologique de la D vu la citation (c’est d’ailleurs ce que j’ai fait moi-même dans l’intro qui suit). En revanche, les deux premières phrases me semblent moins bonnes. La première parce qu’elle répète ce qui va être dit dans la question ; la seconde parce que le mot “irréalité” est trop abstrait et qu’il aurait été meilleur de parler clairement de “mensonge” ou au moins de “sentiment flou, trouble dû à la duplicité, dualité des gouvernants”.
Plan :
- Le peuple, esclave ou maître de la démocratie ?
- Le peuple n’est pour autant pas amorphe.
- Deux issues possibles : être asservi si pas de contre-pouvoirs, être maître si contre-pouvoirs
Les I et III sont identiques ce qui laisse supposer le peu de cohérence fonctionnelle de ce plan. En outre, le II est hors de propos : si l’État doit adoucir le peuple par la force ou par l’endoctrinement – et c’est ce qu’écrit Chomsky – c’est que le peuple n’est pas amorphe. Il est donc paraphrastique de rédiger une partie intitulée ainsi.
Proposition d’introduction
Eugène Delacroix peint en 1830 La Liberté guidant le peuple. Le peintre s’inspire des Trois Glorieuses : une révolution menée par le peuple contre son gouvernement. Ainsi les français se sont soulevés en s’appuyant sur leur liberté. Cependant, d’après Noam Chomsky, “si le peuple lève la voix” et “qu’il[s] refuse[nt] l’autorité civile”, “il faut alors contrôler [ses] pensées”. Le linguiste ne semble pas approuver l’idée de Delacroix. Partant, il commence, à l’aide de la corrélation adverbiale “ne nullement”, par exclure la stricte différence entre “l’endoctrinement” et “la démocratie” jusqu’à annoncer que “l’endoctrinement” est “son essence même”. En rappelant que “certains l’ont [déjà] remarqué”, l’auteur généralise son idée ce qui en amoindrit l’audace. L’Américain propose deux solutions : le “bâton” et la “propagande”. La première est concrète : elle repose sur la violence des Etats militarisés. La seconde est plus subreptice (détourné, à l’abri des regards, en cachette, en catimini), Chomsky traite d’un “consensus d’illusions nécessaires” que l’on associe au contrôle des “pensées”. Ce “consensus” serait la clé pour manipuler le peuple quand “il devient arrogant”. Ainsi, pour établir une démocratie tout en évitant la violence, il faut contrôler la “pensée” des “gens”. Une démocratie, telle qu’elle est présentée ci-dessus, paraît s’éloigner du modèle antique et de notre régime actuel. Cependant, est-il nécessaire de manier / troubler / rendre poreux / rendre perméable l’esprit du peuple pour instaurer une démocratie ? Le cas échéant, pourrions-nous nous considérer en démocratie bien que, comme le suggère son étymologie, le pouvoir y appartienne au peuple ? A la lumière des deux pièces d’Aristophane Les Cavaliers et L’Assemblée des femmes, de la partie IV du tome II de l’essai De La Démocratie en Amérique d’Alexis de Tocqueville et du roman Le Complot contre l’Amérique de Philip Roth, nous répondrons en trois temps. En premier lieu nous analyserons l’intérêt et la nécessité de manipuler / manier / diriger à sa guise / rendre versatile l’opinion publique pour stabiliser la démocratie, puis nous regarderons ses possibles effets néfastes et la décadence que cela peut entraîner au sein du régime démocratique. Enfin nous développerons que, à cause de l’inconstance de l’Homme, il est nécessaire de l’aider pour qu’il vive sereinement en démocratie / pour que vive la démocratie / pour que continue de vivre la démocratie.
Énoncé du plan
- Adoucir le peuple par la manipulation de l’opinion publique : une vertu ?
- Effondrement progressif de la D. dû aux effets néfastes et à la décadence qui découlent d’une manipulation du peuple
- Aider l’Homme pour pallier son inconstance et qu’il vive bien en D
Propositions de plans détaillés
Alex :
I] Adoucir le peuple par la manipulation de l’opinion publique : une vertu ?
- L’opinion publique est centrale dans la direction que prend une démocratie
- Un peuple agité rend les régimes instables
- On peut donc penser que adoucir le peuple en manipulant l’opinion publique rend la démocratie plus stable
II] Effondrement progressif de la D. dû aux effets néfastes et à la décadence qui découlent d’une manipulation du peuple
- La D se construit sur une liberté de pensée Bien que le fonctionnement général de I soit probant, ce II. 1. en est une re dite et c’est maladroit.
- Cette dernière permet à la D de se renouveler
- Un peuple manipulé tue alors la démocratie
III] Aider l’Homme pour pallier son inconstance et qu’il vive bien en D
- Les opinions des citoyens évoluent dans le temps -> explicitation de l’inconstance de l’Homme
- Être en désaccord avec la majorité semble faire sortir de la démocratie
- Influencer les hommes vers une pensée commune peut l’aider à bien vivre en démocratie La formulation de ce paragraphe calque le titre de la grande partie. On pourrait le formuler plus avantageusement en “L’endoctrinement proposé par Chomsky, s’il a pour objet de limiter l’inconstance et de mener vers une pensée commune utile, est peut-être un bienfait démocratique”
Florian
I]Intérêt d’adoucir le peuple par la manipulation de l’opinion publique :
- Quand la D utilise le bâton // La D ne pouvant user du bâton, on en arrive à une situation…
- Quand le bâton ne suffit plus on doit recourir à la manipulation
- But recherché par la D (maintenir l’Etat) -> ce paragraphe montre pourquoi la D recourt à la manipulation exposée en I.c.
II] Effondrement progressif de la D. dû aux effets néfastes et à la décadence qui découlent d’une manipulation du peuple
- Violence du peuple en réaction aux exactions de l’État
- Un peuple sénile / trop docile / trop malléable
- But recherché par le peuple (expression de sa liberté)
III] Aider l’Homme pour pallier son inconstance et qu’il vive bien en D
- Garder un peuple ignorant rend sa vie plus facile à gérer et à vivre
- Existence de contre-pouvoirs aidant l’Homme à bien vivre -> réciprocité de l’endoctrinement
Rémi:
I] Intérêt d’adoucir le peuple par la manipulation de l’opinion publique :
- Il est naturel qu’un pouvoir politique ait le pouvoir d’influencer le peuple
- Il est nécessaire qu’il y ait au moins une source d’influence pour qu’une société ne sombre pas dans l’anarchie.
- Il faut par ailleurs que chacun soit un minimum satisfait du pouvoir en place pour que l’on ne voie pas se développer des groupes dissidents et qui ne peuvent être régulés.
II] Effondrement progressif de la D. dû aux effets néfastes et à la décadence qui découlent d’une manipulation du peuple
- Une fois les manipulations devenues apparentes l’idée que la démocratie prône une liberté exempte de toute influence peut se voir bafouée
- De plus s’il y a au moins deux pensées irréconciliables (ce que l’on peut concevoir si deux pouvoirs influents se disputent le pouvoir et manipulent le peuple ) au sein du pays la confrontation entre celles-ci fait disparaître l’aspect de vivre ensemble
- L’idée de manipulation peut faire penser qu’il puisse y avoir une dérive vers l’asservissement du peuple
III] Aider l’Homme pour pallier son inconstance et qu’il vive bien en D
- L’Homme est par nature inconstant et son comportement peut dériver pour autant il n’y a pas la nécessité qu’un seul pouvoir domine, il faut une multitude de sources pour représenter les idées du peuple et pour qu’il n’y ait pas un asservissement de la population
- Il faut de plus qu’au moins un des contre-pouvoirs se trouve en apparence désintéressé du pouvoir tel que la presse car elle n’a pas la volonté de posséder ledit pouvoir
- il y a aussi une nécessité d’éduquer la population pour permettre aux gens de juger et d’être responsables de leur pouvoir politique
Cyril :
I] Adoucir le peuple par la manipulation de l’opinion publique : une vertu ?
- Plaire au peuple…
- … pour le mieux le contrôler
- Le despotisme doux par des moyens divers : psychologiques et politiques et oratoires.
II] Effondrement progressif de la D. dû aux effets néfastes et à la décadence qui découlent d’une manipulation du peuple.
- Les libertés bafouées.
- La dérive de la démocratie vers des tyrannies ou oligarchies
- Les abus des dirigeants. 2 et 3 devraient être inversés car le 2 est la conséquence la plus funestes du 3
III] Aider l’Homme pour pallier son inconstance et qu’il vive bien en D
- Prévenir les inégalités et abus entre citoyens supposés égaux.
- Entretenir la passion pour la démocratie par des biais distincts de la manipulation telles l’éducation, la culture…
- Le despotisme doux assure le sentiment de bien-être de la foule.
Marius :
I] Adoucir le peuple par la manipulation de l’opinion publique : une vertu ?
- Un peuple discipliné
- Un peuple uni -> unité nationaliste
- Un peuple qui ne s’éparpille pas (rapidité des décisions). -> efficacité
II] Effondrement progressif de la D. dû aux effets néfastes et à la décadence qui découlent d’une manipulation du peuple.
- L’opposition devient une minorité. (on tend vers le monopartisme)
- La majorité lui impose ses idées et la minorité perd sa liberté de parole. 1 et 2 semblent une même idée où 1 est l’énoncé général et 2 l’explicitation particulière.
- La minorité finit par se sentir exclue, nous ne sommes donc plus en démocratie.
III] Aider l’Homme pour pallier son inconstance et qu’il vive bien en D
- La liberté de parole doit être indiscutable
- L’importance de la justice qui condamne la violence et fait régner la liberté de parole (sans être influencée par l’état)
- La valeur de liberté de parole ne doit pas être imposée, son importance doit être comprise. Ceci afin qu’elle ne fasse pas partie d’un ensemble de valeurs modelées dans l’esprit des citoyens. Les trois sous-parties s’axent sur l’idée de liberté de parole sans la lier à celle de l’inconstance des Hommes. Il faudrait commencer en montrant que la liberté de parole permet de lutter contre les dérives de l’inconstance.
Arnaud
I/
- Contrôler les passions
« L’endoctrinement » du peuple permet au gouvernement en place de canaliser les pulsions humaines. L’humain étant sujet à ses passions, il est inconstant, il est par conséquent nécessaire de faire face à sa nature imprévisible. Partant, le contrôle du peuple permet d’éviter toutes les dérives d’une société au sein de laquelle la passion seule domine. Il faudrait veiller à ne pas trop “mordre” sur les arguments développés dans la synthèse. Ici, on montre l’utilité pour l’État de ce contrôle. En III, on en montrera les dangers quand il devient trop puissant.
- Un contrôle légitime, voulu par le peuple…(Le peuple en démocratie est celui qui élit son représentant, il est par conséquent auteur de ce contrôle)
- Une différence destructive.
En démocratie chacun est libre d’avoir son opinion. Le dîner chez les Roth montre à quel point cette liberté peut devenir dangereuse (les personnages en sont venus aux mains). Une multitude d’opinions qui peut se trouver à la source de conflits destructeurs pour la démocratie.
II/
- Une différence constructive
Les opinions diverses et variées participent vivement de la démocratie. La démocratie est un régime politique particulier, qui arrive à concilier ces opinions divergentes. Une force pour elle qui peut être mise en danger par « l’endoctrinement »
- La liberté mise en danger.
La démocratie à pour valeur fondatrice la liberté, si cette liberté vient à manquer, la démocratie n’est plus. Despotisme doux…
- L’uniformisation : le fait que l’égalité soit poussée à l’extrême
Un risque d’uniformisation…
III/
- Espoir
L’Homme doit garder espoir en la démocratie. Un contrôle subtil doit donc lui permettre de raviver en permanence l’espoir. L’importance des symboles….
- Une violence maîtrisée / Sécurité
Les conflits internes à la démocratie sont maîtrisés. La sécurité du peuple au sein de celle-ci est préservée. Une sécurité qui ne doit pas remettre en cause la liberté.
- Un contrôle adapté
Pour diriger l’Homme vers son but, il est nécessaire de lui rappeler son rôle au sein de la société. Son but étant une participation active à la démocratie. L’Homme doit être responsable au sein de la démocratie…
Adrien
1/
A Grâce à la manipulation et à l’endoctrinement l’état n’a pas besoin de recourir à la force pour contrôler le peuple.
B Or le peuple à besoin d’être contrôlé car un peuple est trop désobéissant alors il peut faire courir un régime à sa perte
2/
A Suite à une propagande trop intensive le peuple peut se retrouver privé de son libre arbitre
B Un endoctrinement du peuple pourrait donc transformer un régime démocratique en un régime despotique
3/
A Pour qu’un homme vive bien en Démocratie malgré la propagande il est nécessaire de mettre en place des contre-pouvoirs : association, presse
B Pour éviter l’inconstance du peuple il faut tendre vers l’égalité car lorsque tous les individus forment une même masse ils vont avoir tendance à agir tous de la même manière Une telle chute qui fait des peuples démocratiques un “troupeau de moutons” est trop fataliste pour le thème au programme. Ce thème exige presque une chute tournée vers l’optimisme.
D’autres ressources en français pour les prépas scientifiques ont été mises en ligne :
Thème de la démocratie :
- La démocratie française CPGE
- Le thème de la démocratie en CPGE scientifique
- Prépa scientifique : démocratie à Athènes
- La Prépa scientifique : démocratie aux Etats-Unis
- Exemples de dissertation sur la démocratie en CPGE scientifique
- Cours de français : démocratie en prépa scientifique
- Exemples d’épreuves de français aux concours : démocratie
- Citations sur la démocratie en prépa
- Corrigé d’une dissertation sur le thème de la démocratie en prépa
- CPGE : Oeuvres du thème démocratie
- Dissertation sur la démocratie en CPGE