Économistes, sociologues, comment raisonnent et travaillent-ils ?

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Raisonnement et travail des économistes et des sociologues

Quelles questions fondamentales se posent économistes et sociologues et comment font-ils pour y répondre à travers la pratique quotidienne de leur travail ?

I – Sciences économiques : la discipline en question

Tout au long de son développement, l’économie a cherché à résoudre la question de l’allocation des ressources. Elle prend pour un fait qu’il y ait certains individus qui cherchent à échanger des biens entre eux et ne s’intéressent pas au fait de savoir pourquoi tel individu possède tel bien, et en cette quantité.

Ainsi, si un individu riche cherche à échanger un des biens qu’il produit avec un individu pauvre, l’économie ne s’intéresse pas quant à savoir si cet échange est juste, ou s’il est moral pour la personne riche de ne pas venir en aide en pourvoyant des ressources à la personne pauvre sans contrepartie en retour. L’économie cherche à connaitre les dotations des individus dans chaque bien ainsi que leur demande pour l’autre bien présent dans la situation d’échange afin d’établir, en fonction des quantités possédées, un prix de vente de chacun des deux biens, lequel résulte de la situation d’échange.

La détermination du prix à partir de ces interactions va permettre à chacun des individus d’échanger leurs biens en ayant conscience de leur valeur marchande dans la situation présente. À la fin de l’échange, chacun des individus possédera une certaine quantité de biens, laquelle devra satisfaire sa demande pour les biens proposés à l’échange. On dira qu’une allocation des ressources est efficace lorsque tous les individus ont obtenu la quantité de biens qu’ils désiraient lors de l’échange : leur demande est satisfaite et ils ne sont pas lésés car la valeur de leur bien a été déterminé par leur relative abondance et par le nombre de personnes qui désiraient les acquérir.

C’est pourquoi on est souvent amené à parler de processus d’allocation des ressources rares par le marché en économie : d’après l’hypothèse néoclassique standard, le marché est capable de distribuer à chacun la quantité de biens qu’il recherche. Il constitue alors un moyen efficace d’allocation des ressources rares.

Les sociologues ont un objet de travail particulier : ils étudient les individus, plus spécifiquement les interactions de ceux-ci à travers les groupes sociaux. Les individus en société s’organisent de différentes manières selon leurs groupes d’appartenance, leur classe sociale, leur travail, l’organisation à laquelle ils appartiennent, les mouvements sociaux auxquels ils participent…

Et ce sont toutes ces différentes façons de s’assembler que les sociologues vont étudier, selon différentes perspectives. Selon l’école de pensée à laquelle il appartient, un sociologue pourra par exemple essayer de démontrer grâce à ses différentes publications scientifiques que les comportements des individus sont dictés par les structures auxquelles ils appartiennent (par exemple, un professeur de français est peu susceptible de faire des mathématiques pour son loisir le week-end) ou alors, considérer que l’individu a toujours une marge de manœuvre et qu’il opère des choix conscients en fonction de sa connaissance du monde qui l’environne. Les comportements sociaux peuvent donc s’expliquer de plusieurs manières selon les lunettes que l’expert utilise pour interroger et faire parler le réel.

En interrogeant le monde social, le sociologue sera amené à se poser des questions telles que : quel est le rôle de l’école au sein de la mobilité sociale des individus ? Existe-t-il des classes sociales au sein de la société et si oui, sur quels critères sont-elles établies ?

II – En quoi consiste le travail des économistes et des sociologues ?

Le travail des économistes

Les économistes étudient des domaines très variés. On distingue différentes sous-spécialisations en économie en fonction notamment de la taille de l’effet que l’on cherche à étudier. Les macro-économistes se passionnent pour les questions qui ont trait à l’organisation du marché du travail, à la croissance et au chômage tandis que les micro-économistes se passionnent pour les questions relatives à la structure de marché (y a t il beaucoup d’entreprises en situation de concurrence pure et parfaite ? et en situation de monopole ?) et aux comportements stratégiques des acteurs entre eux. Un micro-économiste pourra avoir ce type de raisonnement : si nous sommes deux entreprises sur un marché et que nous sommes concurrents, ai-je intérêt à baisser mon prix de vente pour vendre davantage d’unités de bien produit ?

Pour travailler à toutes ces questions, les économistes partent d’un constat : le réel est trop difficile à expliquer, car il y a trop de paramètres à prendre en compte. On ne peut pas tous les expliquer : ce serait bien trop complexe, et le but d’une étude rigoureuse et justement de montrer par quel moyen on arrive à expliquer un phénomène de manière précise et efficace. Les économistes vont donc décider d’utiliser des modèles pour simplifier la réalité afin de l’expliquer.

Un modèle n’a pas pour but d’être une représentation fidèle de tout ce qu’il se passe dans la réalité à un moment donné : il doit seulement chercher à décrire de manière efficace un phénomène donné. Dans le cadre d’un modèle, on établit des hypothèses restrictives : par exemple, on peut faire l’hypothèse que les pays n’échangent pas de biens entre eux, ou encore qu’ils décident de n’échanger que le bien dans lequel ils sont le plus spécialisé. Ces hypothèses sont le maillon central du modèle : elles définissent d’où l’on part. Leur utilité est primordiale puisqu’elles permettent d’ordonner la construction du modèle. Une fois le modèle construit sur la base des hypothèses, ses implications théoriques (les conclusions auxquelles ont parvient) peuvent être confrontées à la réalité afin de savoir à quel degré la représentation effectuée est pertinente pour étudier un phénomène.

Il faut alors distinguer les modèles purement théoriques, qui n’ont aucune application pratique et qui peuvent être appréhendés comme une vue de l’esprit d’un problème particulier, et les modèles empiriques, qui partent de données réelles ou cherchent à établir des hypothèses simplificatrices pouvant expliquer une partie du réel.
Ces modèles sont essentiels quant au rôle de « conseiller au prince » que joue l’économiste : ils lui permettent de baser ses affirmations sur un solide socle de connaissances statistiques, par exemple dans le cadre de conseil aux politiques publiques.

Le travail des sociologues

Les sociologues effectuent un travail qui se base sur des données concrètes : tout ce qu’ils peuvent dire et établir du monde social se base sur l’exploitation de données de terrain recueillies pendant un travail de terrain dont la durée n’est jamais inférieure à quelques mois. Cela signifie que le travail du sociologue est rythmé en plusieurs étapes : il doit effectuer une enquête de terrain pendant plusieurs mois voire années avant de pouvoir exploiter ses documents. Toute recherche est donc fondée de manière rigoureuse sur des faits établis et ne provient pas de l’imagination, ex nihilo.

Le sociologue peut adopter plusieurs postures lors de son travail de terrain : il peut choisir de révéler qu’il effectue une étude sociologique ou garder cette information pour lui. Il doit dans tous les cas veiller à ce que sa présence n’influence pas trop son terrain, auquel cas les relations qu’il étudierait entre les individus seraient trop biaisées. L’exploitation des données peut prendre deux formes différentes :

• L’enquête qualitative : Lors de son enquête, le sociologue interroge à de nombreuses reprises les acteurs sociaux grâce à un questionnaire qu’il aura lui même pré-établi. Il pourra choisir d’établir un questionnaire directif, semi-directif ou libre, en fonction de ses hypothèses de départ et de la liberté de parole qu’il souhaite laisser aux personnes qu’il interroge. L’exploitation de ces questionnaires constituera un matériau de travail pour le sociologue.
• L’enquête quantitative : Le sociologue interroge un large panel d’individus, et peut aussi choisir d’utiliser des documents qu’il a à sa disposition. Il choisit ensuite d’exploiter les données par l’analyse quantitative : il utilise des méthodes statistiques afin de voir si certaines hypothèses qu’il a retenu sur ses bases de données sont significatives ou non. Cette significativité des données permettra au sociologue de montrer qu’il a bien identifié des effets particuliers.

III – Exploitation quantitative des données : corrélation et causalité

Les économistes comme les sociologues peuvent être amenés à utiliser les statistiques pour évaluer l’impact de certaines variables sur d’autres variables afin de voir s’il y a un impact significatif de l’un sur l’autre. Attention cependant ! Des variables peuvent être corrélées entre elles (par exemple, il est plus probable d’être un homme quand on est un voleur) sans que le fait de posséder un de ces traits caractéristiques n’entraîne l’apparition de l’autre (tous les hommes ne sont pas des voleurs).

Autrement dit, corrélation n’implique pas causalité. Il faut être très attentif à la manière dont on interprète les résultats statistiques car des erreurs ont tendance à être facilement effectuées. Pour arriver à différencier corrélation et causalité, les économistes comme les sociologues utilisent des modèles de régression.

Le but de ces modèles est d’expliquer une certaine variable d’intérêt en fonction d’autres variables que l’on suppose explicatives. La régression va permettre d’identifier quelles sont les variables les plus pertinentes pour expliquer la variable d’intérêt. On va ainsi pouvoir éliminer de la réflexion des variables dont on pensait qu’elles pouvaient expliquer le phénomène, alors que tel n’est pas le cas.

Ces modèles ne sont toutefois pas infaillibles : il arrive que l’on oublie de prendre en compte des variables explicatives, car on n’y a pas pensé par exemple, ce qui fausse la justesse du résultat que nous obtenons. Des variables peuvent être corrélées entre elles, ce qui amène à une mauvaise interprétation des données. Le travail statistique est important puisqu’il permet de résoudre toutes ces difficultés posées par l’analyse. 

Pour appréhender au mieux le reste des cours de SES au programme du lycée, il est fondamental de comprendre ce cours de SES sur la réflexion et le raisonnement des économistes et sociologues. Les notions abordées dans ce cours seront importantes pour tous les futurs cours de SES au lycée, mais aussi pour les cours d’ESH dans les meilleures prepa HEC par exemple. Voici les autres grands chapitres de SES au programme de seconde :

• création et mesure des richesses
• la formation des prix sur un marché
• devenir des acteurs sociaux
• l’organisation de la vie politique
• les relations entre les diplômes, les emplois et les salaires