Pourquoi ce sujet sur « le désir et son objet « ?
Comme tout sujet semble-t-il classique, les données du problème sont plus complexes. Le piège serait de se lancer dans une récitation de cours. Il faut remarquer, plutôt, que le sujet n’est pas « l’objet du désir » mais « le désir et son objet ». Il faut ainsi interroger la polysémie du mot « et » : est-ce une relation de dépendance ? une relation hiérarchique ? de cause/conséquence ? C’est la nature de cette relation qu’il faudra complexifier. La conjonction de coordination « et » constitue le mot le plus important du sujet : le voir sera faire un grand pas en avant vers une bonne note ; le manquer sera très pénalisant. C’est ce que le jury de culture générale aux concours BCE et Ecricome voudra déceler en premier lieu dans une introduction. Souvent dans les sujets, les mots apparemment les plus « innocents » sont les plus importants…
Cette relation entre le désir et son objet (dans la problématique) ne peut être réduite à une question fermée, pouvant être résolue par « oui » ou « non » ; le jury attend plutôt que cette relation soit interrogée dans toute sa profondeur.
Enfin, par sa nature large, ce sujet se prête également bien à un vaste examen de connaissances, même si le plus important en la matière, est de mettre ses connaissances au service de la réflexion sans les réciter.
Retrouvez une autre dissertation rédigée et corrigée sur le désir.
Introduction de la dissertation de philosophie sur le désir
« On en vient à aimer son désir et non plus l’objet de ce désir ». Cette réflexion de Nietzsche, dans Par-delà le bien et le mal, nous place d’emblée face à une interrogation paradoxale : le désir est-il une action transitive ou intransitive ? A-t-il réellement besoin d’un « objet » pour exister, ou bien peut-il se trouver indépendant, autonome, autotélique ?
L’intitulé « Le désir et son objet » nous conduit ainsi à nous interroger sur les relations, les interconnexions et les dépendances mutuelles entre « le désir » et « son objet » – et non, plus spécifiquement, sur « l’objet du désir », qui aurait nécessité un traitement différent. La distinction entre besoin et désir nous permet de mieux comprendre la spécificité du désir. Si l’on prend l’acception commune, établie par exemple par la conception épicurienne (Epictète, Manuel), les besoins sont pour un homme, et même pour tout homme, en premier lieu les besoins naturels et nécessaires (boire, manger, respirer en sont les trois premiers et les trois principaux).
Ils ont pour but la subsistance et la conservation du corps. Le désir, au contraire, serait un état plus complexe, quelque chose de plus proprement humain, lié aux soubresauts et aux nécessités de l’âme, à dominante psychologique et non physiologique, insatiable peut-être par nature, plus subjectif en tout cas que le simple fait – objectif – d’avoir soif ou faim.
Comment alors étudier cette relation entre le désir et son objet ? Si le désir naît d’un manque, la relation entre le désir et son objet serait ainsi marquée par la nécessité de combler ce vide, de remplir une insatisfaction. L’objet de mon désir serait d’entrer en possession de cet objet, qu’il soit matériel (moyen) ou immatériel (le bonheur, comme fin) ; compris comme cela, le désir serait ainsi un état qui devrait légitimement prendre fin, s’évanouir et disparaître quand cet objet sera acquis. Ainsi, nous tendrions à décrire cette relation entre le « désir » et son « objet » comme une tension provisoire, une étape vers un objectif, la source de satisfaction.
Cependant, par la conjonction de coordination « et », le sujet nous invite à réfléchir non pas sur les conditions dans lesquelles ce manque pourrait être rempli, c’est-à-dire à étudier seulement la cause de la naissance du désir, en même temps que celle de sa disparition. Il convient en effet, au-delà, de nous demander comment appréhender la relation entre le désir et son objet en la voyant autrement que par de simples et lâches liens de cause et de conséquence, de chronologie ; de nous inscrire dans une question dépassant peut-être le simple objet du désir.
Autrement dit, nous nous demanderons dans quelle mesure cette relation entre le « désir » et son « objet » est plus profonde, plus complexe, plus aventureuse aussi, que le simple fait de « satisfaire » un désir en entrant en possession de son objet ; d’examiner enfin si ces liens de causalité ne peuvent pas être remplacés par des liens d’identité (faut-il dire le désir « et » son objet, ou bien le désir « est » son objet ?). Cette interrogation nous conduira à passer par trois chemins : d’abord, par celui qui appréhende simplement le désir comme étant une volonté d’acquérir un objet-moyen, dans le but d’atteindre un objet-fin immatériel que l’on pourrait résumer comme étant le « bonheur ».
Cependant, nous verrons que c’est justement dans ce verbe « atteindre » que réside le problème, et l’on examinera ainsi en quoi cette relation entre le « désir » et son « objet », entre la « fin » et le « moyen », peut se brouiller – dans la mesure où la fin et le moyen se confondent. Par conséquent, si le désir et l’objet semblent enfin en venir à se confondre, dans une relation si réciproque, si intime, nous finirons par en déceler les causes et le remède (si cela est possible) : des causes non pas reliées à l’objet désiré, mais au sujet désirant.
I – Le désir et son objet, dictée par la simple nécessité « d’atteindre » un objet pour éteindre un désir
I-1) L’objet du désir : combler le manque qui en serait à l’origine ?
Commençons par nous interroger sur ce qui est à l’origine du désir. Sur ce point, la réponse peut de prime abord paraître facile : le désir vient d’un manque, et c’est cette conscience du manque qui nous fait désirer ce que l’on veut. L’objet du désir serait ainsi de combler ce manque. « Tout désir naît d’un manque, d’un état qui ne nous satisfait pas ; donc il est souffrance, tant qu’il n’est pas satisfait » écrit à titre d’exemple Schopenhauer dans Le Monde comme Volonté et comme Représentation.
Par-delà même, si l’on considère la relation désir-objet sous cet angle, le désir semble indissociable de son objet. Sans désir, il ne peut en effet y avoir objet du désir, alors que l’objet peut exister sans conscience du désir. De plus, le désir ne survit que parce que le manque perdure ; sitôt ce dernier comblé, on peut imaginer qu’il n’y a plus désir. C’est donc d’emblée une relation paradoxale, précaire, qui semble s’installer entre le désir et son objet : car le désir est la volonté d’acquérir cet objet, mais en accomplissant cette volonté il disparaît.
Cette première relation de désir-manque noue ainsi une dépendance très étroite entre le désir et son objet. Elle présuppose une chose : la transitivité du désir. S’il n’y a désir que parce qu’il y a objet, on ne désire jamais intransitivement. On ne dirait ainsi jamais « je désire » mais toujours « je désire quelque chose. »
I-2) La transitivité du désir nous amène à sa subjectivité
Dans l’équation « le désir et son objet », il faut faire ainsi entrer en relation un troisième composant, le sujet : si le désir est, comme nous l’avons déduit jusqu’ici, quelque chose de transitif, il faut un « sujet » (le « je » dans le « je désire ») pour exécuter l’action qui nous poussera à entrer en possession du désir. La transitivité du désir implique dès lors sa subjectivité.
Cette subjectivité du désir nous place face à un autre enrichissement des données du problème. En effet, jusqu’ici, nous avons surtout considéré l’objet du désir comme un objet matériel, dont nous pourrions facilement entrer en possession, le garder, le stocker.
Mais dans le cas où cet objet du désir serait immatériel (le bonheur), la notion même de subjectivité que nous avons dégagée nous place face à une difficulté possible.
I-3) Le désir serait porté vers un objet immatériel, insaisissable
Que « l’objet » du désir soit davantage un état d’esprit immatériel (le bonheur) que la simple satisfaction d’un besoin physiologique nous semble plus concevable : en effet, comme nous l’avons dit en introduction, le sujet du devoir est « le désir et son objet » et non « les besoins et leurs objets », ce qui nous invite ainsi à considérer le désir dans toute sa complexité psychologique, qui dépasse le traitement plus physique, physiologique, recouvert par le terme « besoin ».
Si la relation entre le désir et son objet est sous-tendue alors par une quête plus complexe, celle de combler « les besoins de l’âme », comment entrer en « possession » de ce sentiment de bonheur, cette idée étant par essence une donnée subjective, variant entre chaque personne, complexe à appréhender ? Si l’on définit le désir comme une possible quête du bonheur, encore faut-il entendre ce que l’on comprend par « bonheur ». Kant, dans les Fondements de la Métaphysique des Mœurs, définit lui le bonheur comme « le bien-être complet et le contentement de son état en vue de sa conservation ». Deux idées donc se dégagent de cette définition : celle de la plénitude et celle de la durabilité de ce sentiment.
TRANSITION : De là nous pouvons apercevoir toute la difficulté et l’ambiguïté de cette quête. Résumons-nous : la relation entre le désir et son objet ne peut pas simplement être la recherche de la satisfaction d’un manque physique (le « besoin »), mais la recherche d’un certain désir plus immatériel (le « bonheur »). Par conséquent, cette relation se complexifie : comment poursuivre un objet qui semble insaisissable ?
II – Le désir et son objet, une relation qui consisterait à poursuivre l’horizon
II-1) Un objet-horizon
Pour survivre, pour persister dans l’esprit, le désir nécessite que ce « contentement durable de son état » – le bonheur selon Kant – soit absolument impossible à satisfaire durablement. Est-ce le cas ? En effet selon Spinoza (L’Éthique), le désir constitue « l’essence même de l’homme, en tant qu’on la conçoit comme déterminée, par suite d’une quelconque affection d’elle-même à faire quelque chose » ; selon lui il serait vain de considérer le désir comme un état irrationnel, passager, contre-nature ; le désir fait partie du conatus de chaque être et procède d’élans aussi indépassables que naturels. Ainsi, dans la relation duale entre le désir et son objet, il faudrait ajouter un troisième élément : la condition humaine, qui permettrait à cette relation de perdurer.
Si l’on suit Spinoza, la relation entre le désir et son objet serait ainsi autant infinie – puisque le désir appartient à l’essence même de l’homme – que hiérarchisée : l’objet du désir aurait beau changer, le désir en lui-même demeurerait.
De là vient donc ce que nous appellerons l’« objet-horizon » constitutif du désir. L’homme qui souhaiterait se débarrasser du désir, serait comme un marcheur qui tenterait d’atteindre l’horizon. À chaque étape franchie durant sa route, à chaque « objet du désir » satisfait, il croirait avoir atteint le terme de son chemin – le marcheur-désirant penserait enfin atteindre l’horizon-bonheur. Mais il réaliserait que l’horizon est encore insaisissable et que cent nouveaux chemins – cent nouveaux objets à désirer – s’offrent à lui pour l’atteindre.
II-2) Une relation marquée par l’insatisfaction permanente et donc la souffrance
Cette relation entre le désir et son objet susciterait ainsi, du fait même de son impossible résolution, de puissants sentiments de frustration, d’insatisfaction et in fine de souffrance morale. Il n’y aurait que des plaisirs très provisoires et précaires à se satisfaire d’un objet, puisque, au moment même où il serait satisfait, l’horizon de la fin du désir s’éloignerait.
C’est en ce sens que Schopenhauer, dans Le Monde comme volonté et comme représentation, écrit que « tout vouloir » (désir) procède d’une « souffrance » dont seule la satisfaction peut mettre fin ; or si cette satisfaction est possible dans le cadre d’un objet-matériel ponctuel, « pour un désir qui est satisfait, dix au moins sont contrariés ». Le chemin que j’emprunte pour atteindre l’horizon du désir aurait pu être autre : je ne prends pas toutes les voies.
De plus, Schopenhauer soutient – dans un parallèle que nous pourrions rapprocher de notre métaphore avec l’horizon – que « le désir est long » et que ses « exigences tendent à l’infini », alors que « la satisfaction est courte » et peu intensive. « Le désir satisfait fait aussitôt place à un nouveau désir : le premier est une déception reconnue, le second est une déception non encore reconnue » poursuit-il dans sa vision bien pessimiste : le désir semble ainsi condamné à un échec recommencé en permanence. Est-il possible de prendre conscience de cet échec, voire de le solutionner ?
II-3) Ignorance et confusion de l’objet
Pour aboutir à cette solution possible, il faudrait en premier lieu que le marcheur vers l’horizon du désir, soit lui-même conscient de la difficulté et de la réalité de sa tâche. C’est en somme la connaissance des frustrations possibles qui serait le prérequis à leur résolution – car pour résoudre une difficulté, il faut encore la connaître. Dans l’équation entre le désir et son objet, il faudrait ainsi ajouter une autre donnée : celle de la connaissance de la difficulté du problème.
Il y a justement un mot sanscrit : « Avidyā », qui désigne « l’ignorance », ou « l’aveuglement ». Dans le bouddhisme, l’ignorance fait partie des Trois Poisons (les deux autres sont l’intolérance- colère-aversion et la cupidité-avidité, le désir). Et c’est l’ignorance qui est la cause originelle de ces deux autres poisons : en somme, c’est par l’ignorance que naît le désir ; c’est peut-être par son contraire (la connaissance) que nous saurons l’éteindre.
TRANSITION : Pour vaincre donc cette ignorance et ce désir source de tant de souffrance, la philosophie épicurienne propose – pour résumer – un détachement des turpitudes du monde déchaîné et une autorégulation par la tempérance triomphante. L’épicurisme s’inscrit donc en faux comme toute conception de la vie en tant que jouissance assumée de la recherche de satisfactions agréables et non bonnes, pour reprendre la dichotomie socratique. Mais du même coup, adopter cette approche ne serait-il pas nier l’« essence de l’homme » mise en avant par Spinoza ? Vouloir contraindre cet objet du désir, ne serait-ce pas vouloir, en vain, outrepasser la nature du sujet ? Ne faudrait-il pas alors, plutôt que de chercher à dépasser cette impossibilité de vaincre le désir, à s’en accommoder ?
III – Le désir comme angoisse du sujet mortel à ne pas pouvoir embrasser tous les objets
III-1) Le désir est son objet
Plutôt que d’essayer, en vain, d’essayer de résoudre cette équation désir-objet, en mettant fin au désir, ne pourrait-on pas voir dans cette quête perpétuelle du désir, non seulement une nécessité, mais un compromis nécessaire ? Ainsi, ce que l’on a décrit comme étant une confusion coupable (confusion entre objet-matériel, comme moyen et objet-immatériel, comme l’horizon architectonique du bonheur) ne pourrait pas être en une.
En effet, et de manière paradoxale, la félicité humaine ne consisterait en aucun cas en « quelque chose » d’immatériel, en ce bonheur introuvable, ce désir insaisissable ; mais, bien au contraire, comme l’écrit Hobbes au chapitre XI du Léviathan, en une « continuelle marche en avant » (nous avions dit, vers l’horizon) pour atteindre l’objet-repère du désir. Alors, dans ces conditions, cette insatisfaction perpétuelle, entre le désir et son objet, ne serait pas une souffrance, mais une opportunité.
Le désir proclamé, affiché, revendiqué de « recherche du bonheur », cet objet que l’on croit suprême, n’est alors qu’une sorte d’alibi pour pouvoir jouir sans cesse. Ce que l’on rechercherait ainsi dans cette quête, dans cette relation entre le désir et son objet, ce ne serait pas la durabilité de la satisfaction, et donc l’extinction du désir – et donc de l’homme selon Hobbes (« Celui dont les désirs arrivent à leur terme ne peut pas plus vivre que celui dont les sensations et les imaginations sont arrêtées » écrit-il en effet dans ce même chapitre du Léviathan Hobbes) ; ce que l’on recherche, c’est plutôt le désir lui-même et non son objet. La relation entre le désir et son objet serait ainsi paradoxale : l’homme blâmerait son incapacité à assouvir ses désirs ; mais dans le même temps, cette quête lui est associée comme la chair au corps.
Dès lors, nous pouvons donc dire que le désir est son objet, et qu’inversement, l’objet est le désir : dans le sens où il le nourrit, où l’un ne peut aller sans l’autre. L’objet du désir n’est autre que le désir lui-même, dans la perspective d’en jouir maintenant pour satisfaire notre essence ou dans la perspective de s’assurer la possibilité d’en jouir plus tard. La seule fin possible à ce désir inquiet, marchant toujours vers l’horizon, serait, dans cette perspective, selon Hobbes, la mort (l’absence de volonté en même temps que l’absence de futur). Si le désir se confond avec son objet, il n’y a alors plus quelque tension, mais un véritable système ; les deux semblent liés, profondément, intimement.
III-2) Goûter le désir : un véritable tonneau des Danaïdes ?
Dans cette perspective, le désir est ce qui nourrit lui-même son objet : dès lors, satisfaire un objet de son désir, c’est immanquablement provoquer la naissance d’un objet à désirer. L’image platonicienne du tonneau des Danaïdes nous revient bien sûr en tête (le Gorgias, Platon). Mais c’est ici l’analyse du sophiste Calliclès, présente dans le même dialogue, qui nous paraît ainsi la plus pertinente.
En effet, dans ce dialogue, Calliclès soutient devant Socrate qu’il appartient à la nature même de l’homme de goûter un maximum aux désirs de ce tonneau, sans qu’il soit possible, par la sagesse (comme le soutient Socrate) d’arriver à n’y plus goûter. « Je soutiens que c’est vivre heureux que d’éprouver ces désirs et les autres semblables, et d’être en état de les remplir » énonce ainsi Calliclès, ajoutant : « la douceur de la vie consiste à y verser le plus qu’on peut. »
Devant l’immensité du liquide existant – les objets-matériels à désirer – dans le monde, il faut essayer d’en goûter un maximum : voici la morale hédoniste tirée de cette condition de l’homme par Calliclès. Le désir-objet se confond aussi alors avec le sujet : sur ce quoi il porte est lié à la volonté du sujet, à sa spécificité, c’est-à-dire sa finitude.
III-3) Bonheur de la jouissance… ou angoisse de la mort ?
Calliclès envisageait cette relation, entre le désir, l’objet et le sujet, comme une relation fondée sur la satisfaction des désirs, d’un point de vue hédoniste donc, plaçant le bonheur au centre de tout. Mais est-ce cependant seulement le bonheur qui résulte de cette relation hédoniste ? Peut-on se satisfaire de cette conclusion optimiste ou est-il possible de la complexifier ?
A cela, une réponse peut nous être apportée par le chapitre XIII du tome 2 de De la démocratie en Amérique, d’Alexis de Tocqueville : « Pourquoi les Américains sont si inquiets au milieu de leur bien-être ». Les Américains, constate Tocqueville, changent sans cesse d’occupation, ont sans cesse de nouveaux désirs : sitôt un désir acquis, il faut en changer. Non pas que ce soit l’objet acquis précédemment désiré qui soit en lui-même totalement défaillant, décevant. Mais alors, pourquoi ?
Pour Tocqueville, c’est la conscience de la finitude qui explique cette inquiétude dans le désir – et cette inquiétude est désirée inconsciemment par les Américains. « Le goût des jouissances matérielles » qui semble inséparable de la nature humaine, couplé à la conscience de la finitude du sujet (« Indépendamment des biens qu’il possède, il en imagine à chaque instant mille autres que la mort l’empêchera de goûter, s’il ne se hâte »), peut être l’énigme résolue de ce rapport complexe entre sujet et objet.
En somme, Tocqueville complète Spinoza : si le désir est l’essence de l’homme, c’est bien parce que la finitude en est une autre essence ; la dernière donnée qu’il nous fallait introduire pour peut-être résoudre cette relation entre le désir et son objet, serait la perspective de la finitude du sujet – la mort, l’angoisse de ne pas pouvoir tout goûter, présiderait in fine à cette relation.
Conclusion de la dissertation de philosophie sur le désir
Autrement dit, nous nous demanderons dans quelle mesure cette relation entre le « désir » et son « objet » est plus profonde, plus complexe, plus aventureuse aussi, que le simple fait de « satisfaire » un désir en entrant en possession de son objet ; d’examiner enfin si ces liens de causalité ne peuvent pas être remplacés par des liens d’identité (faut-il dire le désir « et » son objet, ou bien le désir « est » son objet ?).
En introduction, nous nous étions proposés de nous demander d’explorer cette relation entre le désir et son objet, en recherchant en quoi elle pouvait être plus profonde, plus complexe, que la simple relation de causalité. En effet, notre réflexion a permis de mettre en lumière que ces liens de causalité pouvaient être dépassées par des liens d’identité.
Nous avons expliqué pourquoi : car le désir est in fine une action intransitive, étant donné que l’essence de l’homme ; et cette relation, si elle peut se comprendre sous un éclairage hédoniste (celui de Calliclès), peut aussi apparaître comme angoissante, sous la perspective de la finitude de l’homme. Deux conditions essentielles de la nature de l’homme surplombent donc la relation entre le désir et son objet : la finitude de l’homme et son inassouvissement perpétuel qui lui est lié.
Appréhender le problème du désir et de son objet, c’est donc cerner enfin en quoi consiste l’itinéraire de ce sujet marchant. Vers où croit-il marcher ? Tous diront : vers l’horizon, le bonheur, l’immatériel. Mais atteindre l’horizon est un mirage : sans cesse dans sa marche, à chaque point de repère objet-matériel qu’il atteint, le sujet jouit. Or cette jouissance n’est que passagère : sa marche doit se poursuivre. Alors, il poursuit sa marche et, de points de repère en points de repère, sa quête devient sans fin.
Si l’on achève par reprendre l’image platonicienne, l’homme désirant est un Sisyphe remplissant le tonneau des Danaïdes : le sujet, conscient de sa finitude et de son impossibilité à ne pouvoir atteindre l’horizon s’il ne se hâte, tente d’embrasser tous les objets du désir. L’un et l’autre sont liés et pourtant ils semblent contradictoires : là est une des nombreuses contrariétés humaines…
Lire d’autres articles sur la culture générale en prépa HEC :
- Suivre l’actualité en prepa HEC
- Réussir en colle en prepa HEC
- Travailler les matières littéraires en prepa HEC
- Préparer la culture générale de prépa HEC au lycée
- Réussir la culture générale en prépa HEC
- Les épreuves de culture générale en prépa HEC
Analyse des thèmes de philosophie en prépa HEC :
- Thème de philosophie sur la mémoire
- Pensées du philosophe Locke sur la mémoire
- Pensées du philosophe Socrate sur la mémoire
- Les philosophes importants sur la mémoire
- Pensées du philosophe Saint Augustin sur la mémoire
- Thème de philosophie sur le corps
- Thème de philosophie sur la parole
- Thème de philosophie sur l’animal
Retrouvez des copies et des exemples de dissertations :
Thomas