S’initier à la monadologie en philo en Terminale
Pour réussir sa dissertation de philosophie en Terminale, il faut dans un premier temps bien comprendre la méthodologie de celle-ci. Mais rien n’est possible si les connaissances ne suivent pas. C’est pour cette raison qu’il est indispensable de bien connaître ses cours de terminale et d’être capable d’expliquer des notions clés et spécifiques pour montrer au correcteur que l’on a compris de quoi l’on parle. Si vos notes au lycée en philosophie sont trop justes pour le bac, n’attendez-pas le dernier moment, et commencez à prendre des cours particuliers en philosophie dès que les premières difficultés se font ressentir.
Les monades, cet objet ou notion ou concept vu au programme de philosophie en Terminale, ne sont pas faciles à comprendre. C’est pour cela que vous trouverez un condensé, une fiche de cours de philosophie pour mieux vous approprier cette notion philosophique. Cet article fait partie d’un ensemble qui a pour but d’initier à la philosophie de terminale. En effet, malgré la réforme du bac 2021, le nouveau bac, avec ses nouveaux enseignements de spécialités à choisir en seconde, propose toujours en tronc commun des cours de philosophie obligatoire en terminale.
Descartes et la monadologie en cours de philo terminale
Leibniz entre en rupture avec Descartes sur 3 points :
- Sur la définition de l’idée claire et distincte : Leibniz récuse la validité du simple critère de l’évidence. D’une part, on peut interroger la différence entre l’évidence et l’illusion d’évidence : je peux très bien être sous l’emprise de l’illusion (différent de l’erreur) croyant tenir en ma connaissance une évidence. D’autre part, je peux élucider clairement un concept sans que celui-ci ait une valeur objective (ex : mouvement le plus rapide possible). Pour Leibniz, un concept sera valide lorsque qu’il est possible de le décomposer en caractéristiques non contradictoires. Ainsi pour Leibniz les preuves de l’existence de Dieu seront vaines tant que l’on ne se sera pas demandé si le concept même de Dieu est possible, i.e. s’il n’est pas contradictoire.
- Sur le rapport de l’âme et du corps : Leibniz remet en cause l’union substantielle de l’âme et du corps posée par Descartes en lui opposant la thèse de l’incommensurabilité : comment pourrait-il y avoir une interaction entre une matière étendue et un esprit inétendu ?
- Sur la nature profonde de la réalité extérieure : rappelez-vous, l’essence des choses du monde chez Descartes est l’étendue, mathématisable dans un espace euclidien. Or, comme nous le verrons chez Leibniz, la matière n’est qu’apparence : il existe des points d’énergie absolument simples, dont est faite toute réalité, ce sont ces points d’énergie que Leibniz nomme monades en abolissant par là même la différence intrinsèque entre matière et esprit (puisque toute réalité est monadique). Nous reviendrons bien sûr sur ce point.
Qu’est-ce qu’une monade en philo ?
La théorie générale de la monade en philo en Terminale
Commençons d’abord là où nous nous étions arrêtés avec Descartes, à essayer de penser la réalité du monde extérieur. Leibniz constate d’abord que le réel est composé. Quand je prends en main ce stylo, je peux le décomposer en une multitude de parties (un capuchon, une mine, une cartouche etc..). Le composé est nommé agrégat (§2), signifiant par là que sa composition est une pure addition d’unités.
Ainsi puisqu’il est composé, il doit exister dans le réel une unité absolument simple. Leibniz appellent ces notions individuelles des « monades » (nous reviendrons sur l’étymologie de la notion). Elles sont simples, inétendues, indivisibles. Pourquoi inétendues ? Car s’il y a du composé, il y a du simple. Mais s’il y a du simple, ce simple ne peut être spatial puisque l’espace, comme le temps, est divisible à l’infini (§3). Il faut donc poser que la réalité est constituée d’éléments simples inétendues, et ce sont ces éléments qui vont être appelés monades.
Mais un problème se pose ici directement : comment penser une chose inétendue peut-elle être l’essence d’une chose étendue ? Ce paradoxe n’en est un qu’à partir du moment où on cède à l’illusion de la matière, qui pour Leibniz n’est qu’une perception confuse (nous reviendrons sur ce point) (cf. nos remarques sur Leibniz et l’atomisme).
Il faut également rajouter que les monades n’ont pas de relation à une extériorité, elles ne peuvent être modifiées de l’extérieur. En effet :
- On ne peut concevoir que la monade soit altérée de l’extérieur dans la mesure où elle est absolument simple : car si cela devait être le cas, cela voudrait dire qu’elles deviennent des composés. La monade ne peut se transformer que qualitativement, et non quantitativement.
- De telles transformations qualitatives ne peuvent survenir de l’extérieur : « Les monades n’ont point de fenêtres par lesquelles quelque chose y puisse entrer ou sortir ». Si l’âme est une monade, il faudra expliquer qu’elle engendre ses représentations à partir d’elle-même, et que l’impression que nous ressentons de recevoir des sensations de l’extérieur est due à un autre phénomène expliqué par l’harmonie préétablie.
Mais dès lors, comment penser le changement des monades si ces dernières ne peuvent être affectées par l’extérieur ? La seule manière de concevoir le changement sans affection extérieure est le changement qualitatif, qui affecte l’absolument simple : la monade. La conscience est le modèle par lequel nous pouvons penser cette idée. Nos représentations se succèdent, mais notre conscience reste toujours la même. La monade produit d’elle-même la totalité de ses changements, sur le modèle de la série mathématique. Le réel évolue donc de manière continue, c’est ce que les commentateurs de Leibniz ont cru bon d’appeler le « continuisme leibnizien ».
Donc : Le réel est donc composé par des monades absolument simples. Mais les monades ne peuvent être identiques, car sinon le réel serait une seule et même chose. Car si deux choses sont identiques, elles sont la même chose. Comment expliquer que deux choses absolument simple diffèrent ?
La hiérarchie des monades en philo en Terminale
S’il n’y avait pas de différences qualitatives entre toutes les monades, il n’y aurait pas de changement dans les choses puisque ce qui est dans le composé ne peut venir que des ingrédients simples et que la composition n’ajoute aucune qualité nouvelle.
Cette démonstration représente une rupture majeure avec Descartes, dans la mesure où pour lui le réel, dont l’essence est l’étendue, n’admet que des différences quantitatives. Contrairement à ce qu’a cru Descartes, des changements quantitatifs ne produisent pas des changement qualitatifs (en combinant des éléments identiques, on ne peut avoir des éléments foncièrement différents).
Résumons donc : pour qu’il y ait du changement dans le composé, il doit s’expliquer à partir des éléments simples et non par la composition (car elle n’ajoute rien par elle-même) ; s’il y a du changement dans le simple, il ne peut émaner que de l’élément simple lui-même, puisque la monade ne peut être modifiée de l’extérieur. Le §12 va établir une autre propriété du changement : pour qu’il y ait changement, il faut qu’il y ait moteur, un principe de changement. Mais ce principe de changement doit se trouver à l’intérieur même de la monade (sinon la monade ne serait simple). Le principe du changement serait pour ainsi dire la formule de la monade, une quantité initiale d’information qui la programme, de la même manière que la loi mathématique des séries consiste à montrer comment à partir d’une procédure finie on peut engendrer une série infinie. A partir d’un élément fini, la formule de la monade permet d’engendrer l’évolution infinie de cette dernière.
Une fois le programme de la monade terminé, Leibniz dira que la monade pourra arriver à l’état d’entéléchie, notion aristotélicienne désignant le fait d’être à l’état d’achèvement, de perfection. La perfection, pour Leibniz et comme Descartes, est la quantité d’essence. La série infinie des états que développera la monade est bien une entéléchie dans la mesure où elle peut réaliser cette richesse infinie d’essence à partir d’elle-même. Mais deux problèmes se posent :
- Comment penser une pluralité d’états impliquée par le changement en admettant toujours que la monade est simple ?
- Pour penser le changement, il faut toujours un terme fixe (le changement s’effectue toujours par rapport à un état donné qui reste inchangé), la monade doit donc restée permanente même si en même temps elle est le lieu d’un changement.
Pour penser le changement, il faut penser que ce changement n’affecte pas la substantialité de la monade (substance /accident). Pensons le changement en prenant l’exemple de la conscience comme monade. La diversité de mes perceptions (je vois ceci, je touche cela) n’affecte en rien l’unité de ma subjectivité (je reste toujours moi-même en voyant ceci et en touchant cela). Dès lors, ce changement dans l’unité doit être pensé comme une perception, qui n’affecte pas l’unité de la monade.
Le changement de la monade s’effectue donc via des perceptions. Ainsi, pour Leibniz, la perception est un terme générique qui permet de considérer les plantes elles-mêmes comme douées de perception. Si pour Descartes les animaux peuvent être considérées comme des « machines », réduisant par là même le vivant à du mécanique, il existe pour Leibniz un principe vital qui fait que les animaux et les plantes, loin d’être une juxtaposition de particules, se définissent par une combinaison de monades ayant leur propre programme. D’ailleurs, chaque monade pour Leibniz est une entéléchie. Par conséquent, chaque être (plante, animal, homme) est doué d’un programme à développer. Par conséquent, aucun individu ne peut réaliser les possibilités d’un autre. C’est en ce sens qu’on pourrait comprendre la célèbre formule Nietzschéenne « Deviens ce que tu es » (cf. nos remarques sur cette formule).
Ainsi les monades, entéléchies, se développent en fonction de leur programme puisque chacune a un point de perfection qu’elle est programmée à atteindre. Rappelons-le, pour Descartes, il y a nul but, nulle finalité dans la nature (cf. Rémi Garde textit La sagesse du monde). Chez Leibniz, tous les changements sont programmés par
les lois de série de chaque monade et chaque chose tend donc vers un but qui lui est assigné par sa formule. Leibniz réconcilie donc le spontané et le rationnel puisque tous les changements s’expliquent par la formule de la monade, par son programme
et par conséquent ces changements tout en étant spontanés prennent source dans la monade elle-même et sont donc parfaitement rationnels.
De § 20 à 23, Leibniz va donc montrer qu’il existe une continuité entre les divers ordres des monades. La démonstration mobilise le principe de continuité tel qu’il se déduit du principe de raison suffisante, c’est à dire du principe du meilleur : le meilleur système est celui qui réalise le maximum d’effets avec le minimum de principes, le monde le plus parfait obéira au principe de continuité puisqu’à partir d’un seul principe on aura le maximum d’effets, à savoir tous les êtres possibles entre le néant et l’absolu.
Il n’y a donc pas de différence de nature entre inconscient et conscient, puisqu’il y a toujours un degré minimal de perception et que le degré zéro correspondrait à la disparition totale de la monade (cf. nos remarques sur la théorie Freudienne).
Quant au statut des ces principes logiques, comme Descartes, Leibniz dira qu’ils sont innés. Mais cette innéité a une portée différente, car pour Leibniz tout est innée : la monade étant une entéléchie, elle va produire elle-même tous les degrés de perfection dont elle est capable.
La grande objection sur l’innéisme cartésien portait sur l’argument selon lequel les enfants n’ont nullement conscience des principes logiques et que même la majorité des l’humanité ne les connaît pas. Mais pour Leibniz cette objections s‘efface : il y a dans l’âme humaine une formule, une loi de développement qui implique que suivant sa propre loi, l’âme se développera nécessairement jusqu’à la connaissance des principes. Ces principes, Leibniz en donne des exemples :
- Le principe d’identité : A est A
- Le principe de contradiction : ce qui enveloppe une contradiction ne peut être ni vrai ni réel.
- Le principe de raison suffisante (propre à Leibniz) : pour être vrai un raisonnement doit être fondé (sur le plan du discours). Pour être réelle, une chose doit avoir une raison d’être (sur le plan de la réalité).
Il y a donc deux types de vérités :
- Les vérités de raisonnements : vérités logiques, nécessaires
- Les vérités de fait : non nécessaires mais contingentes parce que le même objet aurait été possible (naissance de Jules César en 44
Il existe également deux types de jugements :
- Les jugements analytiques : le prédicat est contenu dans le sujet « Un triangle a trois côté »
- Les jugements synthétiques : le prédicat n’est pas contenu dans le sujet « Ce triangle est bleu »
Ainsi on comprend bien que tout jugement analytique est vrai dans la mesure où c’est dans la définition même du triangle que d’être vrai. Mais la grande originalité de Leibniz sera d’affirmer que toute proposition vraie est analytique. Cette affirmation pose d’importantes conséquences (cf. nos remarques sur Leibniz et la liberté)
Il est donc possible de recherche la raison d’être de chaque chose à l’intérieur même du programme de la monade. Mais si je me place sur le place sur le plan de la causalité finale ou efficiente (cf. cours), je peux toujours trouver une autre raison qui va expliquer mon action (j’écris car je veux exprimer cette phrase, je veux exprimer cette phrase car je veux rendre mon cours le plus clair possible, je veux rendre mon cours le plus clair possible pour être un bon professeur de philosophie. . . etc.). Ainsi la véritable raison suffisante doit être recherchée hors de la série : et c’est bien de Dieu qu’il faudra discuter.
Dieu et les monades en philo
L’existence de Dieu en philo
Nous avons vu que si nous cherchons la raison suffisante des vérités de fait dans la série des faits, nous n’y parvenons pas et aussi bien dans le registre de l’efficience que dans celui de la finalité. Nous sommes toujours renvoyés à l’infini.
Il faut donc chercher pour la série des évènements une cause qui soit hors de la série, plus précisément dans une substance. Pourquoi une substance ? Si nous cherchions la cause dans un accident, nous n’obtiendrions pas une raison suffisante, puisque l’accident a besoin d’une substance pour exister. C’est cette substance nécessaire située hors de la série des évènements du monde et cause de la série que nous appelons Dieu.
Mais Dieu est-il cause formelle ou cause éminente ? Si Dieu était la cause formelle, et non pas la cause éminente, de la série, cela voudrait dire que le monde est en Dieu imposant de situer la raison d’être de la série dans la série elle-même là où l’on vient d’établir la nécessité de chercher hors de la série la raison d’être de la série. Dieu est donc cause éminente, et puisque dans la causalité éminente la cause ne contient l’effet qu’en puissance (différent d’en acte), ce qui se trouve en Dieu est donc la monade en puissance. Chaque monade en puissance, non encore développée, c’est à dire sa formule, sa loi de série se trouve en Dieu, et tend à se développer hors de ce dernier.
Leibniz va en suite démontrer l’unicité de Dieu, et ce de manière très succincte. Si le monde est fait de série interdépendantes, si toutes les séries s’entrecroisent et forment une totalité, il faut expliquer cet entrecroisement et donc situer la cause dans l’unicité d’une substance nécessaire, cause de toutes les séries et de leur interdépendance.
Qu’est-ce qu’un possible ? Leibniz va en donner une définition réelle et non seulement logique. On pourrait définir comme ce qui n’est pas contradictoire, mais Leibniz affirme que le possible est ce qui tend à l’existence. En vertu du principe de continuité, il ne saurait y avoir de distinction absolue entre le possible et le réel, et par conséquent le possible sera ce qui peut exister, non seulement au sens où son existence n’est pas impossible mais aussi au sens de ce qui a une puissance à exister.
Mais alors, si le possible est tendance à exister et si Dieu est parfait, comment expliquer que le possible ne se réalise pas ? C’est que tous les possibles ne peuvent « cohabiter » dans le même monde et que Dieu, être parfaitement bon, choisit l’ensemble des possibles qui ne sont pas contradictoires. On dira alors que les possibles, pour se réaliser, doivent être également compossibles.
Il faut reconnaitre qu’en vertu du principe de continuité, il n’y a pas de différence de nature, mais seulement de degré, entre Dieu et les hommes. Elle tient seulement au fait que l’essence de Dieu est totalement réalisée tandis que celle des créatures est en voie de réalisation.
Ainsi vient, au §45, la reprise de l’argument ontologique visant à démontrer l’existence de Dieu. « Dieu seul (ou l’être nécessaire) a ce privilège qu’il faut qu’il existe s’il est possible ». En effet, un être nécessaire, parfait s’il a une tendance à exister devra nécessairement exister (sinon il ne serait parfait). Montrons donc que le concept de Dieu est possible, i.e. non contradictoire. Ce qui rend une essence impossible, c’est soit la contradiction (possible) soit la limitation, le fait qu’elle soit empêchée par une autre essence (compossible). On a donc :
- La contradiction : A n’est pas A
- La limitation : A est limité, c’est dire qu’il existe un B tel que A n’est pas B
Or Dieu est un être parfait englobant toutes les monades en puissance, il est donc illimité et n’est pas contradictoire. L’idée d’un être parfait est donc celle d’un être qui ne rencontre aucune forme de négation, et par conséquent elle est absolument possible.
La nature de Dieu en philo
Contrairement à l’hypothèse de Descartes où Dieu crée le monde par sa volonté, la volonté divine chez Leibniz obéit au principe du meilleur. Il choisit infailliblement le meilleur, bien qu’il n’y ait là aucune nécessité logique. Le choix divin est un choix des possibles compossibles, en ce sens le passage à l’existence des monades encore en puissance repose sur une nécessité morale, parce que Dieu a nécessairement choisi, parmi les possibles compossibles, le meilleur des monades possibles (critique de Pangloss, cf. Candide de Voltaire). Ainsi Pour Leibniz, voir le mal, c’est mal voir. Il n’y a pas de mal dans la mesure où Dieu a choisi le meilleur des mondes possibles.
Mais si c’est nécessairement le meilleur qui étant choisi par Dieu, passe à l’existence, qu’en est-il de la liberté ou de la volonté de Dieu ?
Le monde et les monades en philo
L’harmonie préétablie du monde en philo
Résumons donc, chaque monade déploie sa propre essence qui est prédéterminée. Comment se fait-il que ces monades différentes puissent cohabiter ? Dieu a fait en sorte que le programme de ces monades soit compossible, et donc qu’elle puisse s’agencer ensemble. Il y a une « monade des monades » qui rend compossible notre monade. « Le monde est une scène de théâtre dans lequel le texte est d’autant plus nécessaire qu’on l’improvise ». On parle donc d’harmonie préétablie.
Un moyen de comprendre l’harmonie préétablie est la métaphore célèbre des horloges. Elles marquent toutes la même heure, parce qu’elles ont été réglées au départ : chacune fonctionne ainsi par son mécanisme interne, sans s’inquiéter de ce que peut indiquer l’autre, et pourtant elles s’accordent entre elles. Autrement dit, chaque monade développe ses perspectives propres, absolument personnelles, intrinsèques, et pourtant elles s’accordent pour obéir aux mêmes lois.
Et puisque seul Dieu est capable de connaître les formules intérieures des monades rendant possibles l’harmonie préétablie, se trouve donc impossible en fait ce que la science considère comme possible en droit : reconstituer à partir d’un phénomène physique tout l’état de l’univers qui lui a donné naissance (en fait / en droit).
La question est de savoir comment il peut y avoir causalité alors même que les monades n’ont entre elles aucune relation. Nous avons l’impression qu’une causalité s’exerce de A sur B, mais en réalité ce n’est là qu’un effet de l’harmonie préétablie qui veut que, lorsque A se déploie, B se limite. Il faut donc revoir le sens de la causalité : puisque A ne peut agir réellement sur B, on dira que A est cause de B quand ce que l’on trouve dans A sert à rendre raison a priori dans ce qui se passe dans B (Dieu est la cause éminente de toutes choses, rappelons nous).
C’est donc seulement pour nous, humains, que A est cause de B. Tout le discours scientifique causale est donc métaphore. La véritable explication consisterait en réalité à connaître la programmation de chaque monade, d’où se pourrait alors pleinement ce que nous désignons en terme de causalité. Car chaque monade est réglée par sa propre formule pour être en harmonie avec le reste du monde monadique : c’est l’harmonie préétablie qui explique comment des monades indépendantes arrivent à interagir ensemble.
A ce titre, on fit de Leibniz un des premiers penseurs du libéralisme et notamment de l’idée selon lequel le marché permet d’agréger différentes volontés individuelles. On retrouve cette idée chez Smith dans la Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776) avec la métaphore de la « main invisible » (cf. cours).
L’âme et le corps en philo
Reste la dernière interrogation portant sur l’union de l’âme et du corps. Ainsi pour Leibniz tout corps est organique (chez Descartes, seul le corps humain est organique le corps étant uni avec l’âme comme une totalité finalisé). Chez Leibniz tout corps est un système finalisé, ordonné. Pour Leibniz, le vivant est une machine, mais une machine dans chacune de ses parties et sans que jamais on rencontre une pièce qui ne soit plus machine, c’est à dire une pièce simple. L’univers est donc un grand vivant, constitué d’une infinité de monades formant un système et se tenant en relation d’harmonie les unes avec les autres. D’où la célèbre métaphore du §67 : « chaque portion de la matière peut être conçue comme un jardin plein de plantes, et comme un étang plein de poissons. Mais chaque rameau de la plante, chaque membre de l’animal, chaque goutte des humeurs est encore un tel jardin, ou un tel étang ». Ainsi le corps, qui semble agir en fonction des causes efficientes, et l’âme qui semble agir par causes finales, sont eux aussi régis par l’harmonie préétablie.
Le monde de Leibniz est donc un monde entièrement spirituel, dont l’essence est la monade substance absolument simple portant en elle le programme de son futur développement. Dieu, substance nécessaire, agence ce monde en vertu du principe de meilleur et des principes logiques faisant advenir des possibles compossibles, au sein d’une harmonie préétablie. Alors que Descartes n’effectue pas de véritable déduction (il trouve la substance pensante, puis la substance étendue, puis certaines propriétés de l’une et de l’autre), Leibniz a au contraire une approche totalement déductive. Cette méthode intégralement déductive sera perçue par Kant comme le prototype du dogmatisme, i.e. l’attitude selon laquelle à partir de l’analyse purement logique on décrit un système qui se heurte à l’expérience, en tranchant à la fin en faveur du logique en la réduisant à une pure apparence.
Cette série d’article sur la philo en terminale peut vous servir si vous passez le bac en candidat libre, que vous soyez au rattrapage du bac ou pire que vous ayez raté le bac. Cela peut aussi vous aider pour travailler votre culture générale en terminale en vue d’intégrer une classe prépa.
Ci-dessous, de nombreux autres cours, dissertations et conseils pour progresser en philosophie en terminale :
- Cours sur l’éducation, la transmission, l’émancipation (au programme de la spécialité Humanités, littératures et philosophie)
- dissertation sur l’opposition entre légalité et légitimité (au programme de la spécialité Humanités, littératures et philosophie)
- Cours sur l’humain et ses limites (au programme de la spécialité Humanités, littératures et philosophie)
- Cours sur l’histoire et la violence (au programme de la spécialité Humanités, littératures et philosophie)
- cours sur le passé en terminale en philosophie